
Toute à ces considérations, je n’ai pas entendu la porte s’ouvrir. Je suis concentrée sur le plaisir que je prends quand je remarque enfin la présence de mon époux et de notre voisin au seuil de la chambre, épaule contre épaule, se branlant en silence en me regardant.
– Fallait pas interrompre votre partie pour moi… mais puisque vous êtes là…
– Quel est donc cet objet, soudain silencieux que tu cherches à nous cacher ?
– Mon nouvel ami, mais je préfère attendre un peu avant de vous le présenter…
Je me lève, ôte le kimono que je tends à notre camarade de jeux. J’aimerais qu’il l’essaie tout de suite, mais il refuse. Je frissonne quand il sourit comme ça, quand ses yeux se teintent de lubricité.
– Avant de l’essayer, j’aimerais le voir sur votre corps quand votre époux vous culbute, mon ange.
Comment résister à une telle proposition ? Ni mon mari adoré, ni moi n’avons trouvé la moindre réponse à cette question existentielle. Je revêts donc le kimono et m’allonge sur le lit, parce que la rencontre avec mon premier joujou sexuel m’a un peu coupé les pattes. Je ne sais pas si c’est lié, mais je m’aperçois que j’ai la bouche sèche. Pour exprimer cette sensation avec précision, je devrais écrire « j’ai la langue comme un steak de cantine ».
Je demande à notre voisin de m’apporter un grand verre d’eau, ce qu’il fait volontiers. Je le bois d’un trait, ce qui n’est pas dans mes habitudes, quelques gouttes d’eau coulent à la commissure de mes lèvres. En tendant le verre vide à notre voisin, tout en le remerciant, je m’essuie du revers de la main. D’un seul coup, le regard de mon époux ne lui ressemble pas. Je veux dire, on dirait qu’il me voit pour la première fois, ses yeux sont animés d’une lueur un peu folle, comme si nous allions mourir dans l’heure et que la seule chose que nous devions faire était de prendre tout le plaisir possible. Dans l’urgence. Une seule et unique chance de nous offrir une jouissance démentielle. Mettre toute notre énergie vitale dans un ultime coït.

Conscient que son regard me trouble, troublé lui-même, mon époux dégrafe son pantalon qui tombe sur ses chevilles, il ne porte ni slip ni caleçon. Il sourit en m’entendant déglutir bruyamment. Mes yeux vont de son visage à son sexe dressé. Je m’allonge sur le dos, écarte mes cuisses. D’un geste assuré, il attrape mes chevilles. Son regard m’interroge « Et les préliminaires ? » Mon regard lui répond « Fuck les préliminaires ! » J’ai, il a, nous avons sous-estimé le pouvoir lubrifiant du gel lubrifiant, aussi quand il me pénètre d’un coup, son sexe s’enfonce tellement en moi qu’il m’atteint en plein cœur. Je pousse un cri où résonnent la surprise, le plaisir et un soupçon de douleur. Mon mari n’a pas le temps de s’en excuser, mon sourire lui intime l’ordre de ne rien en faire.
J’aime quand il va et vient en moi avec autant d’aisance. Il n’est pas en territoire conquis, plutôt en invité d’honneur. J’ondule, je grogne, ravale mes cris de plaisir. Je ne remarque pas tout de suite la présence de notre voisin à nos côtés. Il s’est assis sur le lit, tout près de moi. Il se penche pour mieux regarder le sexe de mon époux, brillant de mille feux, entrer et sortir de mon vagin. Il reprend ensuite sa position pour regarder mon visage. Il écarte un pan du kimono pour observer mon corps tout à son aise. Je ne sais pas s’il marmonne ou si c’est le plaisir qui m’assourdit. Il me semble qu’il dit quelque chose. Mon époux sourit.
Je sens mon front et mes joues devenir brûlants, je sais que je suis en train de rougir. Je m’étonne de l’absurdité de ce rougissement, parce que si la situation pourrait se prêter à cet accès de pudeur, ce qui me fait rougir est en réalité ce que je viens de remarquer. Notre voisin, assis à mes côtés, n’a pas retiré son infâme vieux pantalon de jogging, son érection tend le tissu et c’est la vision de cette bosse qui m’a troublée au point de teinter mon visage. Je ne sais pas si je le leur dirai un jour.
Mes mains sont devenues folles, elles courent le long de mon corps, rapprochent mes seins l’un de l’autre, avant de les abandonner pour caresser mon ventre. Je sens qu’il me manque quelque chose pour atteindre la perfection de ce moment et qu’elles cherchent à m’expliquer quoi. Mon mari est beau comme un dieu, notre voisin ne l’est pas moins. Il arrange une nouvelle fois mon kimono pour mieux jouir du spectacle. C’est alors que la solution m’apparaît. Je lui prends la main et la pose sur ma tempe. Il me sourit et crispe ses doigts sur mes cheveux. Je ferme les yeux pour mieux profiter de toutes ces sensations que m’offrent mon corps, mon mari et notre partenaire. Mes mains ont repris leurs caresses, qui se prolongent jusqu’à ma vulve. J’ouvre les yeux.
– Embrassez-moi !
Quand la langue de notre voisin caresse la mienne, mon époux clame que c’est trop bon, et me demande si je sens qu’il est en train de jouir. Il sait bien que je ne le sens jamais, mais ma réponse n’a aucune importance, sa question n’a pour objectif que de nous propulser un peu plus haut dans le plaisir. Je sens les pulsations de mon vagin autour de sa verge. Le baiser de notre voisin se fait plus tendre. La tête me tourne.
Mon mari s’allonge à mes côtés.
– Vous permettez ?
Nous sourions de le voir réclamer ce baiser. J’ai l’impression d’être une adolescente délurée, entre deux garçons qui m’embrasseraient à tour de rôle. La main de notre voisin caresse mon ventre, mes cuisses. Je lui demande un peu de répit, qu’il m’accorde volontiers. Après de longues minutes entre eux deux, je leur demande s’ils ont aussi le gosier sec. Mon mari me recommande de ne pas bouger, il part dans la cuisine et revient avec un pichet rempli d’eau fraîche, nous buvons dans le même verre. Au point où nous en sommes, le mélange de salives n’est plus un problème.
L’après-midi est sur le point de laisser sa place à la soirée quand, remise de mes émotions, je propose à notre voisin d’essayer son kimono. Il tergiverse, demande à s’isoler dans la chambre d’ami.
– Je préfère l’essayer seul, si ça me convient, je vous appelle, sinon, permettez-moi de ne pas me ridiculiser à vos yeux
Nous lui accordons bien volontiers cette faveur, de toute façon, je suis convaincue qu’il nous appellera. Mon mari décide de profiter de cet intermède pour préparer l’apéro dînatoire. J’ai à peine le temps d’enfiler une robe-chemise que la voix de notre voisin se fait entendre. Je le rejoins dans la petite chambre, j’ai le souffle coupé tant je le trouve irrésistible. Il le remarque.
– Qu’en pensez-vous, mon ange ?
– Attendez, je vais arranger un peu votre tenue…
– Comment ça ?
Je m’approche de lui, relâche un peu la ceinture, échancre l’encolure, écarte un peu les pans.
– Voilà qui est mieux… caché sous le tissu, votre corps ne laisse pas transparaître votre émoi…
– Que devrais-je dire ? Votre robe, boutonnée jusqu’au cou… c’est… j’ose le mot, un véritable blasphème !
– Oh, vous n’êtes qu’un vil flatteur !
Il veut m’aider à déboutonner ma robe, mais ses doigts impatients ralentissent plus qu’ils ne hâtent mon déshabillage. La robe gît sur le plancher quand on toque à la porte.
– Ciel, mon mari !
Mon voisin ouvre les pans et m’invite à me cacher sous le kimono, qu’il referme sur moi.
– Auriez-vous une idée d’où se trouve mon épouse ?
– Votre charmante épouse n’est pas dans votre chambre ?
– Hélas, non… elle a dû sortir pour faire quelques courses, je vais l’attendre dans le salon…
– Vous faites bien, de mon côté, je vais laisser la porte de la chambre ouverte au cas où vous ne la verriez pas arriver…
– Vous êtes bien aimable !
– Mais non, mais non… entre voisins, il est normal de s’entraider…
J’adore quand ils se parlent ainsi, quand leur voix sonne aussi faux que celle des mauvais acteurs de nanards ! Je leur ai dit, un jour qu’on regardait je ne sais quel navet, depuis ils en jouent pour notre plus grand plaisir.
À l’abri du kimono, blottie contre son corps, mes lèvres baisant légèrement son épaule, je caresse plus que ne branle la grosse pine de notre voisin. Je sens les frissons parcourir sa peau. Ses mains courent sur la mienne au-dessus du tissu soyeux.
– Que signifie ce sourire, mon ange ?
– J’aime l’aisance avec laquelle je jouis quand je suis entre vos bras… Je me sens comme…
– Comme ?
– Vous allez vous moquer de moi.
– Pourquoi le ferais-je ?
– Quand vous me touchez, quand vous m’embrassez, quand nous faisons l’amour, je suis un Stradivarius entre les mains d’un virtuose et j’aime ça…
– Oh, mon ange ! Mon ange… mon ange…
Son baiser est émouvant, sincère comme un premier amour.
– Aimez-vous le contact du tissu sur votre peau ?

Sans attendre sa réponse, j’en ceins son sexe et le branle lentement, pour qu’il prenne le temps d’apprécier toutes les nuances que j’y mets. J’aime les mots tendres qu’il me murmure à l’oreille, tout comme j’aime sentir ses grosses couilles frôler ma hanche. D’un geste habile, il écarte le kimono, de telle façon que mon corps nu peut être vu par mon mari. Enfin, enfin seulement, sa main se faufile entre mes cuisses.
– Votre chatte dégouline encore du plaisir de votre époux, mon ange, et de celui que vous avez pris avec lui !
– Dois-je faire une petite toilette ?
– Surtout pas ! Savoir qu’après avoir déjà tellement joui, vous avez envie de moi… vous ne mesurez pas à quel point j’en suis honoré… J’ai espéré pendant des années être le héros d’une telle histoire d’amour et quand j’ai cessé d’y croire, nous nous sommes trouvés… Voyez comme votre époux est heureux de me regarder vous faire jouir, regardez comme il est heureux de vous voir ainsi !
Ma main se resserre sur son sexe, ses mouvements s’accélèrent, mon autre main soupèse, flatte ses grosses couilles, je veux qu’il remarque la douceur qu’apporte le tissu à mes caresses. Il sourit. Bien sûr qu’il la sent, bien sûr qu’il l’apprécie, mais si je montre autant d’ardeur que d’habileté, il ne va pas tarder à jouir. Est-ce là le but recherché ? Je lui souris en retour.
J’insiste. Inlassablement, je lui pose les mêmes questions, ivre de mes mots, ivre de mes sensations, ivre du regard que mon mari pose sur nous, ivre de la voix frémissante de cet homme que je branle et qui me caresse si bien. Il finit par me prendre au mot, y a-t-il une différence entre mes caresses avec ou sans tissu ? « Je vous laisse juge, mon ange ! » Il prend un pan du kimono et veut s’en servir pour me caresser. Je sursaute.
– Non !
– Et pourquoi donc ?
– Vous allez salir votre kimono…
– Le salir ?
– Vous l’avez vous-même constaté, ma chatte dégouline encore !
– Mais, mon ange, ce n’est pas de la saleté, c’est de l’amour, rien que de…
– Ooohh… ooohh…
Ses mots, la précision de ses caresses, la douceur du tissu soyeux m’emportent dans un tourbillon de plaisir. Je jouis sans rien retenir, ni mes cris, ni mes frissons, je vacille, je sens que mes joues se gonflent comme la gorge d’un crapaud, mes yeux se révulsent comme s’ils cherchaient à visualiser cet orgasme directement dans mes tripes. Je m’envole loin de ce monde et du temps, emportant avec moi mon merveilleux amant que je ne cesse de branler, comme si nos vies en dépendaient. Il jouit dans un râle sublime. Nous nous écroulons sur le plancher. Nos bouches se cherchent. Nos bouches se trouvent. Nos mains glissent sur nos corps, légères, aimantes.
Mon mari attend, patiemment, le sourire aux lèvres que nous soyons remis de nos émotions. Enfin, il se lève, se hâte lentement, entre dans la chambre.
– Ah ! Vous l’avez donc trouvée ! Mais où te cachais-tu, ma chérie ?
– Je ne me cachais pas le moins du monde, j’étais justement venue demander à notre… À ce propos, comment dois-je vous appeler « voisin » ou bien « conjoint » ? J’étais justement venue lui demander si par hasard, il savait où tu étais passé, parce qu’il est grand temps de passer à l’apéro. N’est-ce pas ?