Les confessions motorisées – Les tourments de Lucas

Au tout petit matin, Odette traverse la cour du mas et se dirige vers le bâtiment principal. Elle a passé les dernières heures de la nuit dans le patio, allongée sur un lit improvisé pour profiter de la relative fraîcheur. Elle s’apprête à entrer dans la cuisine quand Lucas déboule devant elle.

– Hey, Dédette ! Quelle bonne surprise de te croiser !

– Pour sûr, Lucas, c’est vachement étonnant sachant que j’habite ici depuis plus d’un an !

– Tu me ferais pas monter dans ta voiture, par hasard ?

– Pourquoi ? Tes jambes te lâchent à cinq mètres de ton petit-déjeuner ?

– Dédette ! C’est déjà pas facile à la base, alors si tu pouvais m’éviter tes sarcasmes…

– Je suis moins sarcastique l’estomac plein. On prend le petit-déj ensemble et après, zou ! In ze motorizède confessionnal !

Leur petit-déjeuner avalé, Odette et Lucas montent dans la voiture. Lucas prend tout son temps pour trouver les mots précis et pour ne rien oublier. Il sait qu’Odette se taira, attendra le temps qu’il jugera nécessaire. Il sait aussi que son écoute ne sera pas moralisatrice.

– Tu es bien placée pour comprendre à quel point ça va être difficile de t’avouer tout ça. J’ai conscience qu’il te sera plus difficile d’avoir du recul avec moi qu’avec Pauline ou Manon… mais n’oublie pas que de mon côté, je vais me confier à la sœur de mon grand-père, qui se trouve être la grand-mère d’une des personnes concernées…

Lucas se tait. Il fumerait bien une cigarette, mais on ne fume pas dans la voiture d’Odette. Elle se gare, Lucas sort un paquet, un briquet de sa poche. Odette, attendrie, sourit quand elle le voit sortir un cendrier de poche. « C’est moins crade, plus écolo et… avec cette sécheresse, moins incendiaire ». Elle le regarde faire les cent pas, à fumer nerveusement tout en faisant de grands gestes. Il lui rappelle Jean-Baptiste. Elle n’avait jamais remarqué à quel point il lui ressemble. Plus dans ses attitudes que par son physique. La cigarette fumée, écrasée, son mégot dans le petit cendrier, Lucas remonte enfin aux côtés d’Odette.

– Pas besoin de te rappeler que j’ai fait ma prépa à Strasbourg. Je ne sortais pas beaucoup. Je ne voulais pas gâcher mes chances de réussite à cause d’une vie de fêtard. J’aurais tout le temps après. Un jour, une charmante étudiante m’a tendu un flyer à la descente du tram. Je la trouvais mignonne. Je lui ai demandé si elle serait à la soirée. Son rire… Elle a répondu un énigmatique « peut-être ». J’ai enfin baissé les yeux sur le flyer. Une invitation à l’inauguration d’un love-store. Je me suis senti un peu con. Elle a noté un numéro de téléphone. « Si tu as d’autres questions… » Tellement abasourdi, je n’ai pas compris que c’était le sien. Je suis parti en marmonnant « Bonne journée ! » À chaque fois que mes yeux tombaient sur le flyer, je me disais « C’est la fin de l’année universitaire, j’ai passé mes examens, tenté médecine et j’attends les résultats. À quoi bon tourner en rond dans ma chambre, à ressasser des “j’aurais dû” ? Pourquoi ne pas m’offrir ces quelques heures de liberté ? Pourquoi résister à ces quelques verres autour d’un buffet à parler avec légèreté du sexe comme un jeu et des objets qui en pimentent les parties ? »

Odette pense « C’est sûr, dit comme ça, la question ne se pose pas ! », mais elle garde le silence.

– J’ai attendu trois jours avant d’appeler. Pas la peine de lever les yeux au ciel, Dédette ! Je sais bien que pour vous, les boomers, cette règle est ridicule, mais pour nous, elle est importante. J’ai donc attendu trois jours et j’ai appelé. « C’est pour savoir si ça tient toujours pour la soirée ». On s’est retrouvé avant le début des festivités et on a fini la nuit ensemble. Audrey…

Lucas sourit, les yeux dans le vague.

– À notre deuxième rencart, elle m’a prévenu. « N’espère pas une relation exclusive. J’aime le sexe de groupe ». « Les partouzes ? » « Pas que… » Elle m’expliquait avec naturel, évidence, des pratiques que je n’imaginais pas exister « dans la vraie vie ». Le plaisir qu’elle prenait avec ces hommes qui la baisaient à tour de rôle, s’encourageant, commentant, la diversité de leur corps. Devant ma tête ahurie, elle m’a demandé si je n’étais pas excité à l’idée de la voir jouir d’autres hommes en attendant mon tour. Si je n’étais pas excité en m’imaginant être le premier de ces hommes qui la baiseront dans la soirée. Les images défilaient dans ma tête, comme si j’y étais. Et putain, oui, j’en crevais d’envie !

Lucas, perdu dans ses pensées, regarde par la vitre de sa portière. Après un court silence, il reprend.

– La première fois, elle était seule et nous étions huit hommes. J’ignorais tout de la réalité de ce genre de pratique. Je sais que tu ne te moqueras pas de moi si je te dis que je n’avais jamais vu de vidéos pornos. Je devais être le seul mec de ma génération à n’avoir jamais visité les sites dédiés ! J’ai été super étonné de la voir sucer alternativement deux queues, pendant qu’une troisième allait et venait dans sa chatte, les autres mecs se branlaient en attendant leur tour, certains lui touchaient les seins, le ventre, la chatte, les cuisses. J’ai été super étonné, mais putain, le frisson qui m’a parcouru n’avait pas de prix ! Ni son égal. Je me tenais un peu à l’écart, fasciné d’être le spectateur d’un scénario dont j’allais être l’acteur.

Audrey me suçait quand le premier mec a joui sur son ventre. Je me souviens avoir été admiratif de la rapidité avec laquelle il était sorti de sa chatte, avait retiré sa capote pour éjaculer dans la foulée. J’aurais voulu baiser Audrey, qu’elle me suce, la baiser encore, qu’elle me suce, et jouir dans un feu d’artifice de sperme et de grognements, comme le faisaient les autres participants. Hélas, à peine étais-je en train de la pénétrer que j’ai pensé à ses mots. J’ai imaginé son plaisir et je n’ai pas senti surgir le mien qui a explosé aussitôt. Audrey m’a fait connaître tous les aspects du sexe de groupe et des plaisirs que je voulais explorer. Notre romance a duré tout l’été. Début octobre, si ma mémoire est bonne, j’ai commencé à avoir moins de désir pour elle et elle pour moi. Nous en avons parlé sereinement et tout aussi sereinement, nous avons décidé d’arrêter là. De toute façon, l’année universitaire allait débuter et il était hors de question que je rate médecine une deuxième fois. J’ai décidé de redevenir l’étudiant sérieux, concentré sur ses études que j’avais été jusque-là.

– Tu as réussi à tenir ?

– Aussi surprenant que ça semble te paraître, oui ! De toute façon, je n’avais pas envie de croiser Audrey et mon cercle de relations, très limité, tournait autour d’elle.

Les confessions motorisées – Manon à confesse

J’aime bien discuter avec Pauline. Ces derniers jours, notre amitié a pris un nouveau tournant. En un regard, j’ai compris qu’elle et moi sommes comme Monique et Cathy, comme Rosalie et Nathalie. Je ne sais pas pourquoi ça n’est arrivé que maintenant, mais après avoir hésité, j’en ai parlé avec Pauline, elle m’a dit que ça lui a fait la même chose, au même moment.

Pour fêter ça, je lui ai passé les premiers devoirs que j’avais faits pour Jean-Cule. Il déteste que je l’appelle comme ça, c’est un jeu entre nous. Quand il me demande le respect, qu’il l’exige, je lui réponds « Veuillez accepter mes humbles excuses, monsieur Jean Foncemabalafre-Danton Cule ! » en lui faisant une sorte de petite révérence.

J’ai aussi passé à Pauline la lettre de Cathy pour qu’elle la lise. Je savais que je l’avais gardée précieusement, mais pour être sûre qu’elle ne finisse pas à la poubelle par inadvertance, je l’avais bien planquée. Tellement bien que je ne savais plus où ! Je l’ai retrouvée entre les pages de Manon des sources, ce qui m’a fait sourire tellement c’était évident ! Quand je l’ai relue, j’ai ressenti les mêmes émotions qu’il y a presque deux ans. Les mêmes larmes se disputant avec les mêmes éclats de rire attendris et soulagés.

Lucas et Émilie ont encore reporté leur arrivée. Vincent travaille la terre toute la journée avec Jim. Enzo prépare ses partiels. C’est pour ça que je passe du temps avec Pauline qui a décidé de faire une pause dans ses études, elle envisage de les abandonner, mais n’ose pas le dire à ses parents. Aujourd’hui, je lui ai demandé de me déposer sur le parking de l’hypermarché.

Je connais les habitudes des habitants du mas. On est le premier jeudi du mois, le jour des « gros achats mensuels ». Je sais aussi qu’Odette avoue « aimer flâner en solitaire dans les rayons lessiviers ». Je l’ai donc attendue sur le parking, à côté de sa voiture. Elle est arrivée, poussant son chariot. Elle a fait semblant de ne pas m’avoir vue. Elle a chargé ses courses dans le coffre, d’un geste discret de la main, elle m’a ordonné de ne pas l’aider. Elle a claqué le hayon. Elle s’est installée au volant. J’ai toqué à la vitre côté passager. Odette l’a baissée.

– Ça s’rait pour une p’tite confession, Sœur Blanche-Minette !

– Monte, jeune pécheresse ! Si jamais les mots tardaient à venir, le retable de Sainte-Boitagan y remédiera !

Pauline m’en avait parlé, alors j’ai tout de suite pigé l’allusion. Au départ, c’était comme une blague. Je lui ai un peu raconté ma vie. Je ne savais pas ce qu’elle connaissait déjà. Odette m’écoutait si attentivement que je lui ai donné beaucoup plus de détails que j’en avais l’intention.

J’ai retrouvé mes premiers devoirs l’autre jour, je les ai lus alors j’ai parlé longtemps de ma relation avec Enzo et Vincent. Et puis, de l’arrivée de Lucas dans nos vies. Et pour finir Émilie. Et sans l’arrivée d’Émilie, il n’y aurait jamais eu cette compétition du meilleur chocolat chaud. Et sans cette compétition, Jimmy n’aurait pas gaffé. Et sans cette gaffe, Odette serait encore à Gif-sur-Yvette à attendre toute l’année ses sept semaines de bonheur. Elle n’aurait pas été rebaptisée, à juste titre, Blanche-Minette ! Odette a râlé, elle a même froncé les sourcils, mais son sourire était trop éclatant derrière ce masque de faux reproches pour que je ne le remarque pas. Je lui ai aussi parlé de notre séjour à Avranches, qui nous avait soudés les uns aux autres. Et la découverte des journaux de Louise. Et les photos « tombées du ciel » (je n’ai pas trop insisté sur ce point, parce que j’ai senti le sujet encore très sensible).

– Et Pauline dans tout ça ?

– Quoi “Pauline” ?

– Tu me parles en détail de ta relation avec Enzo, avec Vincent, avec Lucas, avec Émilie. Tu me racontes comment vous en êtes venus à vous demander pourquoi Vincent n’a pas hérité du don de bavardage pendant le sexe, comment il vous a confié se retenir, comment vous l’avez convaincu de laisser venir les mots et comment tout le monde en est heureux. Mais pas un mot sur Pauline.

– Mais quand je dis “on”, quand je dis “nous”, je parle de Pauline aussi !

– Certes, mais tu ne la nommes jamais, c’est pourquoi je te pose la question. Tu pourrais avoir de moins bons souvenirs avec elle…

– Oh non ! Avec Pauline, tout va bien, on s’entend plus que bien…

J’ai l’impression de me justifier. Dans mon idée, cette confession motorisée était juste une blague et là, cette pensée que j’essaie d’oublier me revient en pleine face. Comment trouver les mots pour l’expliquer à Odette ?

– Alléluia ! Louée sois-tu, Sainte-Boitagan ! Alléluia, ma sœur !

Je ris parce que la boîte à gants vient de s’ouvrir et qu’Odette s’en réjouit comme les prédicateurs américains. C’est le hasard, la destinée ou tout autre chose, ou même peut-être rien, mais les mots me viennent pendant que j’essaie de la refermer.

– J’aime passer du temps avec Pauline, parler avec elle. J’aime quand nous nous promenons sans but précis. On va au ciné ensemble et on aime les mêmes films, souvent pas pour les mêmes raisons. On peut parler des heures entières d’une seule scène, la rejouer à notre sauce quand on trouve que notre version serait mieux que l’originale. Je la trouve belle, mais… autant je peux être excitée par la beauté sexuelle d’Émilie quand je la regarde dans… certaines circonstances, autant Pauline, non. Jamais. Je la trouve super belle, mais comme je trouve qu’une statue est belle. Tu vois ?

– Oui. Je vois tout à fait.

– Sauf… sauf qu’il m’arrive parfois de me réveiller avec le souvenir d’un rêve. Toujours le même. Pauline fait l’amour à Enzo. Je les regarde. Lucas prend la place d’Enzo. Je les regarde. Attentivement. Pour noter les différences. Alors, un ange, ou je ne sais quoi, me souffle à l’oreille de faire un vœu. « Être invisible et que Pauline le soit aussi ». Mon vœu est exaucé. Toutes deux invisibles, je lui tends la main et nous nous envolons. Nous sommes toutes les deux sur un lit moelleux comme un nuage de plumes et de coton. Je lui fais l’amour. Elle me fait l’amour. Nous ne baisons pas, nous faisons vraiment l’amour et ce n’est pas gnangnan. Alors que le plaisir est sur le point d’exploser, je me réveille. Mon cœur bat super fort dans ma poitrine. Pourtant, quand je vois Pauline dans la vraie vie, je n’ai aucun désir pour elle, mais ces derniers temps, mon rêve ressurgit parfois au beau milieu d’une conversation. Je suis troublée, mais je trouve toujours une excuse pour expliquer ce trouble. Je n’ai jamais osé lui avouer la véritable raison.

– Et pourquoi ? Pourquoi n’oses-tu pas le lui dire ?

– J’ai peur de perdre son amitié, qu’elle se sente… je ne sais pas… comme… trahie. Je voudrais avoir le courage, mais j’ai vraiment peur de perdre son estime, son amitié. Parce que sans Pauline, sans notre amitié, je ne serais pas aussi heureuse dans ma vie.

– Et à combien estimes-tu la durée de vie d’une amitié basée sur des non-dits ?

Sa question n’appelant pas de réponse, je me tais. Ça fait bien une demi-heure qu’Odette s’est garée rue Basse. Je sors de la voiture en remerciant Sœur Blanche-Minette de m’avoir écoutée, de m’avoir conseillée.

– Allez, va en paix, Manon des sources junior !

Je rigole. J’entre dans la maison. Je bois un grand verre de citronnade. Comme libérée d’un poids, je somnole en pensant à l’été 1974, quand Monique a débarqué chez sa grand-mère, mon arrière-arrière-grand-mère.

Les confessions motorisées – De la théorie à la pratique, quand le rouge vient au tain.

Manon a rejoint Enzo et Vincent d’un pas léger et dansant, mamé le qualifierait de désinvolte. Je l’envie de pouvoir marcher comme ça, comme si elle pouvait s’envoler sur un coup de tête. Je m’entraîne, mais je n’ai pas son naturel. Je me demande si elle s’en rend compte.

– Alors, les garçons (Enzo et Vincent détestent qu’on les appelle comme ça, Lucas s’en fout alors, on ne l’appelle jamais “garçon”) pour que je puisse faire mon choix, vous allez vous désaper. Exactement comme si vous étiez tout seuls dans votre chambre en train de vous branler en pensant à mon corps presque nu, ondulant… comma ça… comme ça… caressant mon corps… comme ça… comme ça…

Manon a respecté à la lettre le scénario que nous avons élaboré. Fascinée, je regardais Vincent se branler. Ce qui m’excitait le plus, c’était de le voir se branler alors qu’il ne regardait pas Manon faire son show. Il se branlait en me regardant, moi. Comme si le mur était en verre.

Quand Manon a fait son choix, elle a pris Enzo par la teub (on adore leur faire ça et eux adorent qu’on le leur fasse), elle l’a installé debout derrière le prie-dieu, face à moi, les bras posés sur l’accoudoir, de sorte que je pouvais mater sa teub, son corps autant que je le voulais.

Manon s’est mise à quatre pattes sur le banc.

– Quant à toi, mon garçon, viens… approche… embrasse-moi, que Pauline voie ce qu’elle manque… Oui, une de tes pelles parfaites. Et après, tu me boufferas la chatte… Oh ! Si tu savais, Pauline… ooh… tu regretterais… Oh oui, Vincent, il faudra lui donner envie de crier son désir pour ta bouche sur sa teuch… Quand je te le demanderai, tu me prendras en levrette… que Pauline puisse admirer ta belle teub bien luisante… tu entreras, sortiras, entreras, sortiras, entreras, sortiras, quelques va-et-vient tendres ou rugueux, lents ou fougueux, entreras, sortiras, et ce petit jeu répété encore et encore. Quand tu n’en pourras plus, tu viendras près de ma bouche, que Pauline puisse voir comme ta teub est délicieuse à sucer, couverte du plaisir que je viens de prendre…

Vincent a fait taire Manon en l’embrassant. Je voulais ne pas trop y penser, alors j’ai regardé Enzo. Un frisson m’a parcouru le dos, pas vraiment agréable, plutôt dérangeant, irritant comme une croûte qui se décolle.

Manon a pris les choses en main. Ils ont fait tout ce que Manon avait projeté, sauf que Vincent n’a pas pu se retenir et que ce petit jeu à duré moins longtemps que prévu. Enzo est venu à son tour près de Manon. J’ai bien aimé les regarder s’embrasser, j’ai même presque fermé les yeux pour imaginer les lèvres d’Enzo sur mes lèvres, sa langue dans ma bouche, la mienne dans la sienne. Quand je les ai rouverts, mon regard s’est fixé sur Vincent. On aurait pu croire qu’il me voyait vraiment.

J’ai regardé Enzo et Manon en pleine levrette. C’est vrai qu’elle est énorme, sa teub ! Je la regardais aller et venir, sortir et entrer quand j’ai remarqué que mon corps imaginait, ressentait Vincent allant et venant en moi. J’ai failli m’évanouir de surprise. Un peu dérangeante, cette surprise.

Heureusement, Manon m’a fait sortir de cette rêverie pas très agréable.

– Oohh oui, Enzo ! Oh, Enzo, c’est si bon (Manon a regardé dans ma direction, elle m’a fait un clin d’œil)… C’est si bon, mon garçon !

Enzo ne pouvait pas ne pas réagir, il aurait perdu la face. Alors, il lui a mis une fessée.

– Ooohh, c’est encore meilleur… mon garçon !

Enzo lui a reproché de trop aimer les fessées, mais personne n’était dupe, il y prenait au moins autant de plaisir que Manon. J’ai réalisé le temps qui s’était écoulé quand Manon a demandé à Vincent de s’approcher et que Vincent rebandait déjà aux 3/4.

C’est en lisant les souvenirs de Monique, ceux de Rosalie que Manon a assumé le plaisir qu’elle prend à sucer un mec quand un autre la fait jouir par la chatte. Après, elle a lu les confidences de Sylvie et celles d’Odette, mais « le bien était déjà fait ! ».

On aime bien évoquer « les fondateurs » et nous dire qu’ils « ont notre sang ». On en rigole, mais en même temps, on en est un peu fières. Si Manon hésite pour ses études, entre lettres et histoire contemporaine c’est justement grâce aux souvenirs de Rosalie.

J’ai regardé Manon. Elle ne jouait plus la comédie, et même si d’une certaine façon, elle le respectait à la lettre, le scénario était aux oubliettes. Je ne pouvais plus détacher mon regard. Je voyais Manon. J’entendais Manon. J’étais Manon. Les mots que Vincent lui disait me donnaient des frissons un peu plus agréables, mais très vite, mon attention s’est à nouveau focalisée sur Manon.

Il m’arrive parfois de me laisser aller à la jouissance aussi simplement, naturellement que le fait Manon, mais sur ce point aussi, elle a une longueur d’avance. J’ai la chance d’avoir une mamé à qui je peux confier mes doutes, parce qu’elle sait trouver les mots pour me rassurer, pour me réconforter. Elle me parle de ses quinze premières années de mariage, quand elle n’osait pas évoquer ses rêves « somme toute bien innocents » avec son mari et comment elle avait regretté tout ce temps perdu et comment, « l’âge et la sagesse venant » elle pense désormais que ces années avaient peut-être été nécessaires pour qu’elle jouisse pleinement de la vie qu’elle a vécue ensuite.

Manon jouissait super fort, faisant crier Vincent de plaisir. Quand ses jurons se transforment en grognements, en cris, en souffle rauque, toute trace de honte ou de gêne, qui pourrait m’envahir, s’envole. Manon jouit. Vincent grogne. Manon grogne. Enzo lui demande de se laisser aller. Encore. Encore plus. Oui, Manon comme ça ! Vincent sort de la bouche de Manon comme on saute d’un bateau avant qu’il ne coule. Manon crie que c’est bon. Enzo crie à son tour.

Je ferme les yeux. Je jouis en imaginant le regard de Manon. J’ouvre les yeux, mon regard croise celui d’Enzo. Mon ventre, mes cuisses sont secouées de spasmes, comme s’il leur manquait quelque chose. J’entends Vincent encourager ses amis. Ses mots agissent sur moi comme un coup de fouet. Je me caresse le clito encore super sensible. J’ai peur d’avoir un peu mal, (ça m’est déjà arrivé en le recaressant trop tôt), mais non. Je crie « Vincent ! » quand mon orgasme explose sous mes doigts. Les visages de Manon, d’Enzo et de Vincent se tournent vers moi. Ils me sourient. Vincent m’envoie un baiser discret.

Plus tard, Vincent est venu me parler, lui aussi se sentait un peu mal à l’aise à certains moments. En tout cas plus que chez Monique et Christian. Malgré tout, on a bien envie de recommencer. Manon est aussi venue me parler, elle voulait que je lui raconte « cette histoire de confessionnal motorisé depuis le début en n’oubliant aucun détail ». Je lui ai donc expliqué comment j’ai croisé Odette hier matin, comment elle m’a invitée à lui parler dans son confessionnal motorisé. Manon a beaucoup ri, mais elle a trouvé l’idée géniale.