La nouvelle vie d’Odette – Chevauchée fantastique

La soirée était bien avancée quand nous arrivâmes au mas. La nuit avait déjà pris le dessus sur le jour. Monique s’était réjouie de pouvoir se garer aussi facilement. Toute à mes papotages entre consœurs, je n’avais pas remarqué la camionnette à côté de la voiture de Jimmy. Je n’y prêtai pas plus attention que ça, j’étais encore sur mon petit nuage et n’avais aucune envie d’en descendre.

Je fis une entrée spectaculaire dans la grande salle qui tient lieu de cuisine et de salle à manger, entre personnalité de marque et grande blessée. Monique criait à tue-tête Place ! Place ! Faites place ! Ses jambes ne la soutiennent plus ! C’était vrai, mais un peu plus de discrétion ne m’aurait pas froissée. Christian et Jimmy se précipitèrent à mon secours, tandis qu’Alain et Jim apportaient un des fauteuils de la salle des spectacles. Je me sentais un brin ridicule, sans en éprouver la moindre honte. Mireille m’offrit quelques mignardises, le front déjà rougi.

– Alors, ça fait quoi ? C’était comment de te faire culbuter par des inconnus ?

– C’était génial, mais j’en ai reconnus certains…

– Normau, t’as triché en envoyant ta petite fée nous espionner !

– Parce que tu crois que je peux décider de ça ?! C’est pas ma faute si tu la fais apparaître, monsieur le Wizard !

– Et en plus, tu te moques, capoune ?! Tu mériterais que…

Il n’empêche que le Bavard était fier que je lui attribue ce mérite.

– Et puis, j’avais reconnu Alain avant !

L’éclat de rire fut général. Comme s’il en était dépité, Alain se demanda à haute voix s’il ne devrait pas se la raboter un peu. Le cri unanime de ses consœurs Surtout pas ! le fit se gonfler d’orgueil. Il tira sur des bretelles imaginaires en souriant. C’est alors que j’entendis des coups de marteau venir de la salle des spectacles.

– Linus ?!

Comme s’il n’attendait que mon appel pour nous rejoindre, il entra dans la pièce. Pendant un court instant, je me demandai combien de temps avait duré mon expérience qui avait débuté le 7 février. Jimmy levait les yeux au ciel, son éternel sourire indulgent aux lèvres.

– Linus est venu en avance pour les préparatifs de la Saint-Valentin

Je me levai afin que Jimmy prenne ma place sur le fauteuil et que je puisse m’asseoir sur ses genoux. Ses lèvres sur mon cou, ses mots chuchotés à mon oreille.

– Ne change pas, reste à la fois surprenante de sagesse et confondante de naïveté. Si tu savais la surprise qui est mienne de ressentir chaque jour la puissance de l’amour ! Je t’aime, ma Princesse, il me tarde d’être au 4 septembre !

– Rapport à la nuit de noces ?

– Capoune !

– J’ai envie de sentir ta main sur mon sein, tes dents déchirer ma peau.

– Là ? Tout de suite ?

– Là. Tout de suite.

– Serviteur !

Je sentis ma peau céder sous sa morsure. Je jouis sereinement en silence. Jimmy le remarqua, son sexe se dressa.

– Je t’aime, Jimmy, je t’aime !

Je pris conscience qu’une conversation avait été interrompue par ces derniers mots que j’avais prononcés plus fort que je ne l’avais voulu. Pour me donner une contenance, je demandai à Linus quels étaient les préparatifs qui l’avaient contraint à avancer sa venue.

– Imagines-tu Betsy et Alister fêter la Saint-Valentin sans cheval mécanique ?

– Tu crois qu’ils pourront s’en passer d’ici là ?

– Peut-être n’auront-ils pas à le faire…

Je me dévissai la tête et regardai en direction de la salle des spectacles. Linus sourit.

– Non, ce n’est pas ce que tu penses, celui que j’installe est le cadeau que nous vous offrons en remerciement…

Je repensai à leur séjour de la Toussaint, aux conséquences qu’il avait eues sur la vie de Socrates et de Roweena. Je revis Betsy émue aux larmes pendant leur séjour fin décembre, Joseph tel le Prince Charmant de la Belle au Bois Dormant, qui avait sorti Aunt Molly de sa torpeur, de sa folie macabre.

– Tu penses avoir fini l’installation à temps pour leur venue ?

– Oui ! Il est déjà prêt, je pensai attendre demain pour te proposer de le tester, parce que ce soir après la journée que tu as eue…

– Tu sais que j’ai reconnu ta main sur ma cuisse, mais je pensais avoir été victime d’une hallucination…

Alain avait traduit notre échange. Mireille leva un doigt timide et toute rougissante demanda à Linus s’il était absolument nécessaire que je fusse la première à l’essayer. Prenant son mari à témoin, elle s’en expliqua.

– Dans mon milieu, les jeunes filles prenaient des leçons d’équitation, c’est juste pour vérifier si les soubresauts de la monture mécanique sont semblables à ceux des vrais chevaux…

– Une espérience ès scientifique, en quelque sorte…

– Tu m’ôtes les mots de la bouche, Blanche-Minette !

Pour déterminer qui serait son partenaire d’espérience, nous décidâmes de nous en remettre au sort. Chaque homme nota son prénom sur un bout de papier, le plus difficile fut de déterminer quelle main serait assez innocente pour procéder au tirage. Mireille estima que cet honneur me revenait. Je plongeai la main dans le saladier. Perplexe, je lus à haute voix. La figure Rosalie. Jimmy éclata de rire. Je me levai pour lui permettre de tenir son rôle de coéquipier.

– De toute manière, n’importe lequel de tous les hommes ici présents m’aurait convenu.

Personne n’eut à traduire la remarque de Mireille à Linus, surtout après notre Pomponnettes Power ! crié collectivement. Elle s’installa sur le cheval et sut d’instinct comment faire pour rendre sa position la plus confortable possible.

– On dit du manque de savoir-vivre des classes populaires, mais vous noterez que dans la haute, ces demoiselles chevauchent les fesses à l’air…

Linus se retourna et fit un clin d’œil à Martial.

– Tu comprends le français ?!

– Joseph nous donne des leçons… Je ne comprends pas tous les mots, mais je comprends l’idée générale.

– J’aime beaucoup Joseph, mais si tu veux faire de réels progrès, ces dames ici présentes enseignent d’une façon… wow ! Amazing !

Mireille installée, Jimmy prit place face à elle, le dos appuyé contre l’encolure du cheval. Linus leur montra comment régler la longueur et la cadence des va-et-vient mécaniques à l’aide de la télécommande. Avant tout, il leur fallut manœuvrer une molette afin de positionner précisément le gland de Jimmy à l’entrée du vagin de Mireille. Elle rougissait, gloussait. Dans mon dos j’entendis Daniel, admiratif, se murmurer à lui-même Madame Fabre.

– Tout est Ok ? Oui ? Alors…

Mireille actionna la télécommande. La vitesse était assez lente pour qu’elle et Jimmy puissent s’habituer aux sensations. Linus recula de deux pas, revint auprès du cheval et demanda à Mireille si elle n’avait pas envie de sentir le souffle de la liberté sur sa magnifique poitrine. Entre deux gémissements, elle lui demanda de l’aide pour libérer ses seins.

Fascinée, je regardais le sexe de Jimmy s’enfoncer au ralenti dans celui de Mireille, puis apparaître à la même vitesse, s’arrêter au niveau de la petite bosse qui semblait servir de repère pour enclencher un autre va-et-vient. J’entendais leurs soupirs, leurs gémissements de plaisir, mais comme s’ils étaient au loin. De tous mes sens, la vue avait pris le dessus. Je ne détachais pas mon regard de ce spectacle si excitant, même lorsque je sentis la présence de Christian à mes côtés. Il savait mieux que quiconque ce que je ressentais, nul besoin de le lui dire, ni de le regarder. Il me fit un bisou dans le cou et partit de l’autre côté du cheval pour bénéficier d’un point de vue plus à son goût.

– Je voulais être sûr que le cheval fonctionnait avant de l’installer sur le carrousel.

– Comment te remercier, Linus ?

Je ne le regardais pas plus que j’avais regardé Christian. Il prit ma main. Son sexe était dur. Il le fut davantage quand je serrai mes doigts de toutes mes forces autour de la hampe et que je le branlai au rythme des mouvements du cheval. Je sentais tous les reliefs de son sexe et je m’imaginais ceux du membre de Jimmy dans le vagin de Mireille.

– En appuyant sur la touche droite, tu accélères les mouvements. Tu veux bien essayer, Mireille ?

Elle fut tentée d’objecter.

– C’est pour valider l’espérience ès scientifique, Madame !

Jimmy se tourna vers moi, son regard glissa le long de mon bras. Il me sourit.

– Si c’est Princesse qui te le dit, nulle raison de remettre en cause son argument. Vaï, fais comme Linus te demande…!

Le cheval accéléra progressivement. Je branlais Linus au même rythme. Je sentis sa main se frayer un chemin dans ma culotte, ma chatte qui avait été soumise à tant de pénétrations, à tant d’attouchements quelques heures plus tôt était d’une sensibilité exacerbée. Les caresses de Linus étaient aussi délicates que les miennes étaient rugueuses.

Autour de nous, les confrères et les consœurs commentaient ce qu’ils voyaient. Marcel s’était approché pour regarder de son œil espert si les mouvements de la monture étaient réalistes. Il fit une moue dubitative. Monique lui demanda s’il s’y connaissait tant que ça en la matière.

– Hé bé oui ! Mon grand-père, paix à son âme, que tu as bien connu avait une carriole tirée par une jument. Marguerite, qu’elle s’appelait !

– Ah bon ?! Je ne l’ai jamais vue…

– Té, qu’elle nous a quittés en 1942, la pauvre !

– Ah oui… donc un an avant ta naissance…

– Et alors ?! N’empêche que Barjaco, il avait une jument…

– Pierrot aussi, si tu vas par là…

– Ben alors, qu’est-ce t’attends pour venir espértiser ?!

Jim s’approcha aussi, puisqu’il est espécialiste des chevaux australiens. Il ne s’attarda pas trop sur les mouvements de la monture, mais reprocha à son coumpan de ne pas avoir remarqué la souffrance des mamelles de Madame qui réclamaient leur dose de caresses. Tout en les soulageant, il s’étonna du manque d’attention de son confrère.

– Mon époux, mon époux, offrez-moi un de vos doux baisers et mon bonheur sera complet !

– Avec plaisir, Madame… Madame Fabre !

Linus demanda à Mireille de tourner la molette de façon à amplifier les va-et-vient et d’appuyer sur le bouton gauche pour les ralentir. Elle obtempéra de bonne grâce à cette requête, je le branlais donc plus amplement et plus lentement. Quelques minutes plus tard, il lui fait faire la manœuvre inverse et mes gestes suivirent cette nouvelle cadence. Je regardais, toujours aussi fascinée, le sexe de Jimmy entrer et sortir de celui de Mireille, à chaque fois plus luisant. Je ne détachais mon regard que lorsque je sentis le sien posé sur moi. Il me souriait, heureux. Sa langue aiguisa ses dents. Je sais ce que cela signifie. Il jouit dans un grognement de plaisir, au même moment, je sentis ma main recouverte du sperme de Linus.

– Perfect timing !

Mireille descendit à grand peine de la monture. « À regret » serait plus exact. Après le dîner, Cathy prit sa première leçon d’équitation avec Alain. Fourbue, je partis me coucher et comme fréquemment, m’endormis entre Jim et Jimmy. Avant de rejoindre notre chambre, je souhaitai une bonne nuit à Linus, lui dis ma hâte de chevaucher avec lui et regrettai de ne pas avoir songé à me procurer de la pierre d’alun. Il me rendit mon baiser, me fit un clin d’œil et en sortit un morceau de sa poche.

Réveil charmant

La nouvelle vie d’Odette – Si t’es fière d’être Blanche-Neige, tape-toi sept nains !

Après une discussion entre consœurs, Sylvie et Cathy m’ont fait un cadeau dont je n’aurais jamais osé rêver. Nous avions longuement parlé de cette sensation ambiguë de nous sentir salopes et d’aimer ça. J’écoutais Sylvie me raconter le plaisir qu’elle avait pris à chaque fois où, les yeux bandés, elle s’était faite tripoter, baiser par des inconnus qui pour la plupart le lui sont restés. De fil en aiguille, l’idée de me faire ce cadeau a pris forme. C’est ainsi qu’au tout début de février, les yeux bandés, je montai dans la voiture de Monique qui me conduisit dans un lieu inconnu.

J’entrai dans une pièce, puis dans une autre. Monique me déshabilla, me fit m’allonger sur le dos. Elle menotta mes mains à une barre au-dessus de ma tête. Je sentis des mains inconnues attraper mes chevilles et les attacher à des étriers. Quand ce fut fait, Monique ôta le bandeau de mes yeux. Je constatai qu’une partie de mon corps se trouvait dans une pièce et que l’autre était dans une seconde, la frontière entre les deux se situait au niveau de mon nombril. Je ne pourrai donc par voir qui me baiserait et comme le dit Cathy,

– Pour ajouter du piment à l’affaire, tous les hommes qui te baiseront mettront une capote, que ce soient des confrères ou de parfaits inconnus ! Qu’est-ce qu’on dit à ses consœurs, Blanche-Minette ?

– Pomponnettes Power !

Cathy s’attendait à un simple « merci », mais elle, Sylvie et Monique répétèrent, enthousiastes, ce qui est devenu notre cri de ralliement. Mireille ne pouvait pas être présente, mais elle s’était consolée en se disant que la prochaine fois, elle serait là.

– Et pour que tu ne meures pas idiote, je t’ai préparé un documentaire pédagogique.

Un casque sur mes oreilles diffusait mes chansons préférées, le documentaire projeté au plafond était une compilation de vidéos de glory holes, les passages que Sylvie trouvait les plus excitants. La diffusion de ces images me donnait une idée de ce qui m’attendait et de ce qui se passerait de l’autre côté de la paroi. Je me sentais couler d’excitation bien avant l’arrivée du premier homme qui me toucha, me doigta comme s’il cherchait à deviner comment il serait dans ma chatte. Je faillis en jouir parce que je savais qu’il ne m’avait jamais baisée avant. Cet homme me baisait sans me connaître, presque sans respect. En tout cas, sans y mettre le moindre sentiment. Il prenait son plaisir en ne pensant qu’à lui et j’aimais ça.

Il se retira et un autre inconnu prit sa place. Mieux membré, à moins que sa façon de triturer l’intérieur de mes cuisses, de les pincer n’ait contracté mon vagin. Pendant qu’il me baisait, d’autres mains écartaient mes fesses et je sentais un doigt aller et venir le long de ma raie. Ça y est, tu y es, tu jouis comme une chienne, salope ! Cette pensée me comblait de bonheur. Une autre main écartait davantage mes lèvres et caressait mon clitoris d’une façon rugueuse. Ils étaient donc trois autour de moi.

Je ne parvenais pas à détourner mon regard du plafond, je voyais ces hommes passer d’une femme à l’autre, le plaisir qu’elles prenaient semblait faire écho au mien. Non ! Quatre, ils sont au moins quatre ! Pendant que les trois premiers continuaient leurs attouchements, un quatrième me suçait les orteils.

Celui qui me baisait se retira. Celui qui avait astiqué mon clito me prit très vite, très fort. Il sortait de ma chatte et me doigtait pour tenter de me faire squirter, mais il s’y prenait si mal qu’il n’avait aucune chance d’y parvenir. Il me reprit, tout aussi délicieusement rugueux. Il me semble l’avoir entendu grogner avant de se retirer, mais je pense avoir imaginé ce grognement.

Je souris en reconnaissant la queue d’Alain me pénétrer. Je me fis la promesse de partager avec mes consœurs la pensée qui me traversa l’esprit. Alain est le seul homme qui ne pourra jamais baiser incognito. Il est non seulement monté comme un taureau, mais bon sang, qu’il baise bien ! Aussi bien que Jean-Luc, ou alors pas loin. Les attouchements de mains inconnues avaient repris.

Je suivais les conseils avisés de Sylvie et de Cathy et ne cherchais pas à deviner qui me baisait, ni quand il cesserait pour laisser la place à un autre. Je ne cherchais pas plus à anticiper de quelle façon s’y prendrait le suivant. Je gardais les yeux rivés au plafond et ne les fermais que lorsque la musique éveillait en moi une source supplémentaire d’excitation. Je ne sais pas qui avait concocté cette playlist, dont certains morceaux eux aussi inconnus me donnaient la chair de poule.

Les hommes se succédaient, je reconnaissais parfois certaines caresses, certains membres. Leurs propriétaires me demeuraient inconnus, mais à leur façon de s’y prendre, je savais qu’ils m’avaient déjà baisée quelques minutes auparavant. Que j’aimais ce luxe de pouvoir jouir sans retenue, sans pudeur de ces hommes qui ne connaîtraient rien d’autre de moi que la blancheur de mon pubis et la moiteur torride de mon vagin !

Les orgasmes se succédaient avec une rapidité déconcertante. J’ai aimé quand un homme m’a prise et que des doigts (les siens ?) ont rejoint sa queue dans mon vagin.

Je fixais le plafond, mais le plaisir recouvrait ma vue d’un voile sensuel qui me rendait presque aveugle. Mon ventre vibrait comme un volcan au bord de l’éruption. Tous mes sens s’entrechoquaient, je ne distinguais plus les notes de musique de mes propres gémissements. Et mon ventre vibrait davantage. Je me laissais emporter dans ce tourbillon avec un plaisir sans nom.

Un homme me pénétra, s’agrippant à mes hanches tandis que d’autres doigts écartaient mes lèvres, effleuraient savamment mon clitoris ne se contentant pas de s’arrêter au gland. La musique semblait venir d’ailleurs. Je me revis à Londres quand avec Jimmy nous avions goûté au plaisir subtil d’une étreinte dans les toilettes d’un pub entre deux sets d’un groupe de rock. La musique présente mais indistincte qui se mélange au brouhaha des conversations anonymes et par conséquent incompréhensibles, des souffles, des respirations.

La main qui se détache de ma hanche. Le son de ce doigt qui se dresse vers moi. Celui d’un visage qui se tourne. She’s cheating ! She’s cheating ! La mélodie du sourire de Jimmy qui fait signe à son ami de se taire. Chut ! La voix du Bavard. Tu triches, capoune ! Le son de sa gifle qui renvoie mon ectoplasme de l’autre côté de la paroi. J’ai eu le temps d’entendre les battements du cœur de Jimmy et son amour pour moi, l’excitation de Christian attendant son tour en respirant comme on siffle, les ailes de son nez vibrantes de désir.

Ai-je eu le temps de leur crier « Encore ! Encore ! » avant de décoller pour mieux plonger dans l’océan infini du plaisir ? Quand je remonte à la surface, à l’exacte frontière de la conscience, quand j’aspire une grande bouffée de réalité, j’ai une pensée pour mes consœurs dont la présence à mes côtés me semble palpable ainsi que leur soutien et je me sens envahie d’une reconnaissance infinie envers Jimmy et son amour qui me permettent de vivre enfin la vie qui est la mienne et dont j’ai failli ignorer l’existence. Plus que jamais l’idée d’unir mon nom au sien dans les registres officiels me semble essentielle pour laisser une trace à tout jamais.

Je me sens décoller une seconde fois et plonger à nouveau dans l’océan infini du plaisir. J’y plonge plus profondément et quand je remonte à la surface, toutes mes pensées se concentrent sur mon plaisir, sur celui que prend cet homme dans mon vagin et de cet autre forcément à genoux dont la langue court le long de la raie de mes fesses vers mon anus. Trop entravée pour réussir à me cambrer, je me délecte de cette frustration. L’homme qui me baise, accélère soudain. Se retire et d’un seul mouvement, m’encule jusqu’à la garde.

Je décolle aussitôt accompagnée d’un bruissement d’ailes, mais avant d’entendre le souffle, le sang de cet homme et de pouvoir le reconnaître, je plonge tout au fond de cet océan de jouissance. J’ai l’impression d’éclabousser mon partenaire comme si nous étions tous les deux au milieu des flots. Il se fige quelques instants, se retire pour laisser la place à un autre au moment précis où je refais surface. La pression de sa main sur ma cuisse lève son anonymat. Je suis stupéfaite et incrédule. Mes sens ne peuvent que me tromper. Il est impossible qu’il soit là. Pourtant ses mains, puissantes, caleuses… Mon ectoplasme ne m’est d’aucune utilité, suspendu au-dessus de moi, il ne me fait entendre que la rumeur, les bruissements de mon propre plaisir.

Un autre décollage, je sens les vibrations dans mon ventre et un courant allant de la plante de mes pieds jusqu’à mes mollets, comme un circuit parallèle. Des mains malaxent mes fesses. Un homme me prend. Je plonge. Des images stroboscopiques se superposent à celles projetées au plafond. Une clairière de forêt en plein été, des hommes qui se branlent pour moi. Des mains qui me touchent. Des mains qui remontent ma jupe. Ces queues inconnues sous mes yeux, rien que pour moi. Ma chatte offerte à la vue des hommes derrière ces queues. L’orgasme est violent. Je remonte à la surface. Des doigts ont pris la place du sexe précédent. Mon ventre ondule. Je m’accroche aux notes de musique, aux images projetées. Combien de fois ai-je vu ce passage ? Qu’il est doué cet homme dans sa façon de me baiser ! La mélodie de ses va-et-vient comme le contre-chant des slut !slut !que je crois lire sur les lèvres de ces hommes.

– Mais c’est ça que tu veux voir, capoune ? Vé coumpan, t’as vu comme elle me fait oui de la tête ? Vé, petite Blanche-Minette, t’as vu comme tu me fais bander quand tu me regardes avé la gourmandise ? Qué « chut ! » ? De toute façon, elle sait déjà qu’on est de la fête. Qu’est-ce t’as à rigoler, coumpan ? Qué wizard ? Tu trouves que ça pue ?!

L’éclat de rire de Jimmy et d’Alain.

– Il dit que t’es un sorcier, couillon !

– Vous me fézé débander avé vos conneries ! Té, qu’elle te réclame, Jimmy ! Je te laisse la place.

La curiosité de mon ectoplasme a ses limites, il réintègre mon corps dans ce bruissement d’ailes que j’ai appris à reconnaître. Jimmy oublie qu’il est là pour me baiser, au lieu de ça, il me fait l’amour. Je me concentre à nouveau sur les images projetées au plafond et sur la voix d’Irène Papas que j’ai reconnue à la première écoute. I was, I am, I am to come, I was*. Jimmy s’efface pour céder sa place à un inconnu. Au plafond, des voyeurs se branlent en attendant leur tour.

Le casque de mon walkman sur mes oreilles, assise sur un transat, j’écarte les cuisses et je me masturbe en regardant le ciel comme si mon image se reflétait dans les nuages. Mes mamelons pointent sous le chemisier que je me suis acheté la veille, la mousseline de soie ajoute à mon excitation. Je sais qu’il remarque tous ces détails et qu’il se branle dans son jardin, n’attendant que mon regard pour cesser de m’observer et faire semblant d’être excité par les photos du Penthouse d’août 1983. Je décolle une fois de plus m’arrachant à ce souvenir que je croyais oublié pour plonger dans la réalité du plaisir que je prends maintenant.

Mon cri me déchire les tympans autant que les cordes vocales. Je ne veux pas savoir pourquoi j’ai joui si fort, ni comment, ni par qui. Tout ce qui m’importe c’est la puissance du plaisir que je viens de prendre. Je me surprends à jouir en égoïste et à me contrefoutre de savoir si le sien a été à la hauteur de mon orgasme.

Des mains libèrent mes chevilles de leurs entraves. Sylvie me rejoint, détache mes mains, me pose une question que je n’entends pas, me sourit, retire le casque de mes oreilles. Pas besoin de te demander si tu as apprécié ! Elle noue le bandeau sur mes yeux, me guide jusqu’à la voiture de Monique. Sylvie à ma gauche, Cathy à ma droite, je me sens comme une reine de beauté entourée de ses dauphines pendant les quelques mètres que nous parcourons.

La voiture démarre, je leur offre l’exclusivité du récit de cette journée. Ce n’est qu’à l’approche du mas que Sylvie dénoue le bandeau. Je les regarde et plus que jamais comprends ce que signifie faire partie de la Confrérie du Bouton d’Or et les en remercie.

Chevauchée fantastique

*∞ in 666, Aphrodite’s Child (1972)

La nouvelle vie d’Odette – Tout autour de toi, vite, vite il vient, s’en va, puis il revient *

Vaï, au lieu de nous retourner au village, ramène-nous à Aubagne…

Nous venions de nous installer à la terrasse d’un café quand nos téléphones sonnèrent. Je rassurai Sylvie et lui précisai dans un éclat de rire que les propos que tenaient Cathy ne reflétaient pas l’exacte vérité et lui fis promettre de la rétablir auprès de son époux.

– Qu’est-ce qui te fait dire que je parlais à Alain ?

Je pris un air « on ne me la fait pas ».

– « T’inquiète chéri, tout va bien, mais tu connais Odette et ses bavardages incessants. Je te rappelle quand on reprend la route »

Cathy éclata de rire.

– C’était Monique !

– « Chérie » pouvait prêter à confusion, je n’ai pas entendu le e muet…

Cathy sursauta, visiblement sidérée.

– Tu… tu es en train de me dire que Monique… que Monique serait… une fille ?!

– Au lieu de te moquer de moi, raconte-moi la suite, après la sonnerie du réveil !

– Quand Monique est venue me chercher, le soleil se couchait, la place était vide, il n’y avait personne dans les rues, mais au moment de rentrer… Même s’il n’était que six heures du matin, même si Alain me déposait en voiture, je ne voulais pas prendre le risque de croiser quelqu’un en nuisette et les fesses à l’air. Ni Monique, ni moi n’y avions songé dans l’excitation de la veille… Alain m’a prêté un short et une de ses chemises, je ne pouvais pas caser mes nichons dans ses tee-shirts. Il fallait que je parte très vite pour ne pas croiser quelqu’un là-bas, la sœur à Paulo ou un de ses enfants ou son mari… tu vois ? Pour ces mêmes raisons, je ne pouvais pas demander à Alain de monter jusque chez moi ou lui demander d’attendre en bas. Il a souri et il m’a dit « Dans ces conditions, je garde ta nuisette en otage, tu ne la récupéreras qu’en échange de mes vêtements ! »

Ça faisait bien longtemps que je n’avais pas été aussi avenante avec les clients de la boulangerie que je le fus ce dimanche matin. Autant distraite aussi ! À peine je me suis dit que le temps s’écoulait trop lentement, qu’il était déjà l’heure de fermer la boulangerie. Je suis rentrée chez moi, j’ai préparé mon déjeuner en chantonnant alors que je n’avais même pas allumé le poste. Après manger, je me suis allongée pour me faire une bonne sieste. Alain m’avait donné rendez-vous sur le chemin qui mène au village et nous devions nous y retrouver en fin d’après-midi pour une nuit de plaisir « et plus si affinité ». Il avait ri en disant ces mots qu’on voyait fleurir sur les petites annonces. Je ne travaillais pas le lundi et ses congés avaient débuté le samedi.

Je devais être plus fatiguée que je le croyais parce que je dormais profondément quand la sonnette a retenti. Je me suis réveillée en sursaut, j’ai ouvert la porte. Monique était là, souriante. « Je ne te dérange pas ? » Elle est entrée, elle a eu un petit sourire gêné « Ah. Tu n’es pas seule… Je me disais bien… » Je ne comprenais pas ce qu’elle voulait dire. D’un coup de menton, elle me désigna le short et la chemise d’Alain sur le dossier de la chaise. Fan, j’aurais pu m’étouffer de rire ! Je lui ai expliqué pourquoi ils étaient là. « En plus, j’ai toqué plusieurs fois, comme tu ne répondais pas j’ai sonné, et comme tu as mis longtemps à ouvrir… Je me suis dit que tu n’étais pas seule et je préfère être seule pour… » Monique cherchait ses mots, on était plantées là, comme deux cruches. Elle s’est assise, je lui ai servi un café qu’elle touillait en fixant les tourbillons dans la tasse. Elle a levé les yeux vers moi, elle a souri. « Non, pas besoin de sucre, de toute façon, je n’aime pas le café ! » Elle a pris une grande inspiration. « À propos d’hier soir… je voulais te dire… j’étais un peu jalouse… » « De moi ?! » « Mais non ! D’Aloune et de Christian ! Quand je t’ai vue, maintenant que je te vois… j’ai la bouche sèche, le cœur qui s’emballe, la chatte humide… J’ai envie de toi, qu’on se caresse, qu’on s’embrasse, qu’on fasse l’amour, mais rien que toi et moi. Rien que pour nous deux. C’est la première fois que ça m’arrive de me caresser en pensant à une nana. Si tu ne veux pas, c’est pas grave, je n’insisterai pas, ça ne changera rien à l’amitié que je te porte, mais c’est justement au nom de notre amitié que j’ai voulu te dire toute la vérité. » Fatché ! En moins de vingt-quatre heures, je me prenais deux déclarations d’amour et de la part de deux personnes qui me plaisaient bien. « Finis ton café et rejoins-moi dans ma chambre ! » Pourquoi j’ai dit ça ? Je crois que je serai morte et enterrée avant de le savoir ! Monique s’est levée en même temps que moi, elle m’a fait un clin d’œil, elle a souri et elle a jeté le contenu de sa tasse dans l’évier. « Pas de temps à perdre avec ces conneries ! »

J’ai adoré la fougue de notre premier baiser, comme si nos bouches se connaissaient, comme si nos langues avaient toujours tournoyé ensemble. J’ai été surprise de l’impatience de Monique à retirer ma robe, sa maladresse et ses jurons quand il s’est agi de dégrafer mon soutien-gorge. C’était la première fois qu’une nana s’y essayait avec moi et je crois bien qu’aucun de mes amants ne s’y est aussi mal pris. Excitée, troublée, je ne pouvais contenir mon fou-rire. Hou fan ! Ça l’énervait encore plus ! Pour la faire enrager, j’avais refusé de l’aider « Si tu veux voir mes nichons, tu dois le mériter ». Fatché, on dit des miennes, mais les colères de Monique… c’est quelque chose ! Et ses menaces… hou ! D’ailleurs, c’est quand elle a parlé d’aller chercher une paire de ciseaux que j’ai cédé. Monique, tu sais à quel point je l’aime, mais elle change souvent la vérité historique pour raconter comme ça l’arrange. C’est pour ça qu’elle ne parle jamais de cet épisode… mais telle que je me la connais, elle serait capable de dire que c’est par pudeur !

Cathy riait, émue à ce souvenir. Soudain, sa voix prit les accents de la confidence.

– Je crois qu’elle est la seule femme de ma connaissance qui n’a jamais eu besoin de porter un soutien-gorge… C’est avec moi qu’elle s’est acheté son premier. Elle n’en porte que pour exciter le Balafré et le Bavard.

Sa voix baissa encore d’un ton.

– Tu sais comment elle les appelle ? Les pièges à couillons ! Mais le plus amusant c’est qu’elle adorait, qu’elle adore toujours me voir en porter et ceux qu’elle m’offre… hou ! Elle les choisit toujours plus beaux les uns que les autres…

Quand on a été complètement nues, on a réalisé que ce serait la première fois qu’on coucherait avec une nana pour notre propre plaisir. Ne crois pas que j’avais été forcée de le faire avant, non pas du tout ! Monique avait vaguement caressé une autre femme avant moi, mais que les nichons et moi quand je l’avais fait… Je pourrais presque te dire que je ne l’avais jamais fait, parce que ce qui me plaisait c’était d’exciter les hommes en mimant… tu vois ? Je n’y mettais pas de cœur, mes partenaires non plus… On savait ce qu’il fallait faire, ce que les hommes voulaient voir, s’attendaient à voir alors on faisait comme ils pensaient que deux femmes font ensemble. On assurait le spectacle parce qu’on aimait ce sentiment de puissance… faire semblant et être excitées par leur excitation. J’y avais pris du plaisir, mais c’était pas un plaisir né d’un désir profond, d’un désir réel pour une autre femme. Tu comprends ? Alors, avec Monique on se sentait comme deux pucelles, on a bien été obligées de faire confiance à nos corps, à notre instinct, à notre amour naissant. Nos mains tremblaient de désir, nos corps sursautaient de surprise sous nos premières caresses. Monique découvrait le plaisir que lui offraient mes seins et celui qu’elle pouvait leur offrir. Elle s’émerveillait à haute voix, fan ! Que ses mots, ses baisers, ses caresses me rendaient belle ! Et comme j’aimais ses deux petits œufs sur le plat, comme elle les appelait ! Quand nos mains ont glissé plus bas… Je n’avais jamais vu une vraie-vraie blonde, ni un bond aussi blond du bas. Elle m’a fait promettre de ne jamais la surnommer « Bouton d’or », mais sans m’en donner la raison… Bé, de toute façon, j’ai vite appris pourquoi… Arrête de m’interrompre, tu m’embrouilles dans mes souvenirs et je vais encore oublier le principal !

– Mais je n’ai rien dit !

– Ouais, ouais, il y a des silences qui sont plus pires que des questions et pis, je me comprends !

Cathy but son verre d’un trait, héla le serveur pour en commander un autre. Quand il l’eut apporté, elle reprit son récit.

– C’est fou comme un minou peut être délicieux quand on aime la femme à qui on…

– Le broute ?

Cathy me mit une tape sèche sur le dos de la main.

– L’honore ! T’es brave et tout, Blanche-Minette, mais question romantisme, t’as des progrès à faire ! Où que j’en étais ? Je ne me lassais pas de découvrir le sien avec la langue, avec les doigts, avec les yeux… Et j’étais tout autant surprise du plaisir que m’offraient ses doigts, sa bouche et ses yeux… Elle jouissait de moi et moi d’elle rien que pour nous deux. Nous nous sommes promis de nous garder des moments rien qu’à nous, rien qu’à elle et à moi, de nous faire l’amour sans homme pour nous espincha… rien que Monique et Cathy, Cathy et Monique. Même si quelques semaines plus tard on l’a fait devant ceux qui sont devenus nos confrères, on a toujours gardé nos moments rien qu’à nous. Et quand on fait l’amour devant eux, à chaque fois, c’est qu’on a vraiment envie l’une de l’autre. C’est beaucoup plus fort que ce que j’avais vécu avant, mais je crois que les hommes ne s’en sont jamais aperçu.

Monique était venue à vélo, elle ne savait pas que j’avais rendez-vous avec Alain. On a fait le chemin côte à côte, moi avec mon sac rempli de tout ce que j’aurais besoin pour ces deux jours, Monique avec son vélo à la main. Alain nous attendait à l’endroit convenu et Christian était avec lui. Ils s’étaient croisés au village et quand Alain lui avait dit « J’ai rendez-vous avec la belle Catherine ce soir, elle restera jusqu’à mardi matin », Christian lui avait répondu « Elles seront peut-être ensemble, Monique voulait passer du temps avec elle ». Comme la veille, on est montées à l’arrière, sauf que là, on a fait le trajet le coffre ouvert à cause du vélo. Alain me demandait toutes les trente secondes si ça ne m’ennuyait pas qu’on ne soit pas que tous les deux et toutes les trente secondes, je lui répondais que non.

Té, tu m’as encore fait oublier un détail avec tes questions dans tes yeux ! Sur le chemin avant qu’on voie l’auto, j’ai demandé à Monique si elle allait dire à Christian pour nous deux, que c’était pas que du sexe, qu’il y avait du véritable amour. Elle m’a répondu que oui, bien sûr qu’il comprendrait. Je n’en étais pas aussi sûre qu’elle, alors, elle m’a parlé du cahier qu’elle nous avait remis la veille, celui écrit par Rosalie. Elle ne m’a pas dit ce qu’il contenait, mais qu’en le lisant, je comprendrai pourquoi elle était aussi sûre de son fait.

Monique n’était jamais entrée dans l’appartement d’Alain. Elle était surprise qu’il en ait choisi un si petit. Alors, il lui a expliqué que le bail incluait la location d’un box pour y garer son auto et que ça n’avait pas de prix, surtout l’été avec celles des touristes qui encombraient les rues et surtout certains avaient du mal à manœuvrer avec leur caravane. Elle a fait le tour des lieux. On l’a entendue éclater de rire, elle est revenue vers nous en tendant ma nuisette avec ses deux mains, elle l’avait trouvée sur l’oreiller. Elle la faisait danser devant elle « Tu nous avais caché ça, Aloune ! Tu dois être super sexy avec ! » Au plus Alain essayait de lui expliquer, au plus elle se montrait de mauvaise foi, jurant que je ne portais pas de nuisette la veille que j’étais venue en robe. Elle tenait absolument qu’il nous montre comment il était sexy en nuisette…

Cathy s’essuya le coin des yeux humides d’avoir tant ri à l’évocation de ce souvenir qui l’amusait encore quarante-six ans plus tard.

– « Me dis pas que ça t’excite pas, Aloune ! Tu bandes tellement que ton pantalon va exploser ! » « Tu mériterais que je te chasse à coup de pieds au cul, Monique ! Tu as de la chance que je te sois aussi reconnaissant ! Me regarde pas comme ça ! Si tu n’avais pas décidé de rester, je ne sais pas quand j’aurai trouvé le courage de faire signe à la belle Catherine… Je ne sais même pas si je l’aurais trouvé un jour ! » Il l’a prise dans ses bras, lui a fait un gros bisou sur le crâne avant de lui faire les gros yeux « Mais que je ne t’y reprenne pas ! » Alain a mis de la musique, il nous servait à boire quand Monique lui a demandé où il cachait ses revues pornos, celles qu’il rapportait de ses voyages. Elle le soupçonnait d’aller en Hollande pour en trouver des plus salées. Alain m’a interrogée du regard. Je lui ai fait le signe de la bouche cousue. Christian a remarqué notre manège. « Et à moi, Cathy, tu me le dirais ? » Alain m’a regardée, il s’est levé et il est allé chercher son album à fantasmes. « Voilà ce qui m’a permis de tenir ».

J’ai été vachement surprise parce qu’ils m’ont reconnue dès le premier dessin. Quand ils sont arrivés à la première page des gros plans sur ma chatte pleine d’une queue énorme, Monique a fait la moue, elle a demandé à Christian « Tu trouves que c’est réaliste ? Moi, je demande à voir… » Alain souriait, mais il a joué l’artiste offensé. « Bien sûr que oui ! On leur montre ? » Je bouillais de désir, alors tu penses bien que j’ai sauté sur l’occasion ! En fait, on attendait tous un signal pour passer aux choses pas sérieuses. « Puisque Monique affirme que ce dessin n’est pas réaliste, il faut le soumettre à un regard d’expert, une chance que nous ayons le meilleur en la matière, je vais pouvoir te prouver que tu te trompes, Monique ! » Il y a certains moments dans la vie qui forgent une amitié, qui la rendent indestructible, eh bé, ce moment-là… Bien sûr, on en a connus bien d’autres, mais celui-ci…

Pour faire exactement comme sur le dessin, il aurait fallu qu’on s’installe sur un canapé, mais Alain n’en avait pas, alors on est allés dans la chambre. Monique et Christian ont pris une chaise et se sont installés face à nous. Alain était presque assis sur le lit, le dos calé par des oreillers. Fatché, de le voir ainsi… j’étais tellement trempée qu’il m’a pénétrée d’un coup ! Christian regardait le dessin, nous regardait à nous. « Écarte un peu plus les cuisses, Cathy… encore un peu… non ! Un peu moins… cambre-toi un peu plus… encore… tes cuisses, Cathy… » Monique commentait aussi. C’est la première fois que j’ai remarqué ce détail, quand ils sont très excités, Monique et Christian ont une voix un peu métallique. Tu vois ce que je veux dire ? Monique n’était pas convaincue, alors elle donnait ses indications. « Enfonce-toi un peu plus, Aloune… Non ! Pas autant ! Oui ! C’est mieux… » Elle regardait le dessin. « Ah, mais non ! Recommence, mais moins vite… non… plus vite… plus profond… non… moins… » Christian reprenait « Écarte tes cuisses, Cathy… Alain, va plus au fond… Non, moins… Non plus ! Cambre-toi, Cathy ! » Monique faisait sa critique d’art « Tu vois que ce dessin n’est absolument pas réaliste ! Regarde, le clito de Cathy est bien plus gonflé dans la réalité ! »

Alain riait, il la traitait de bougresse. Monique s’est levée, elle est allée à côté de nous, elle a pris la main d’Alain, elle l’a posée sur mon minou. « Tu me traites de menteuse, en plus ?! » J’étais en train de jouir, Monique s’est penchée sur mon entrejambe, elle a regardé Christian. « Tu vois bien que c’est pas du tout comme sur le dessin ! » J’ai retiré la main d’Alain et je lui ai demandé de me décrire ce qui se passait dans la culotte de Monique, qui n’en portait pas, mais on se comprenait. « Elle commence à être légèrement excitée » Monique a failli tomber dans le panneau, heureusement que Christian a dit « Hé bé, excite-la assez pour que tu puisses la prendre comme tu… Stop ! Ne bouge plus ! Ça y est, c’est exactement comme sur… oh ce… c’est parfait… tout est parfait…! » Je le regardais se branler en nous matant tous les trois, moi empalée sur Alain qui faisait aller et venir ses doigts dans la chatte de Monique.

J’ai fait l’innocente et j’ai demandé à Monique de prendre ma place pour être sûre que sur le dessin c’était bien moi et pas elle. Quand elle s’est installée, je me suis assise à côté de Christian. Au plus je lui disais que c’était pareil, elle ou moi, au plus il me montrait les différences. J’avais posé ma tête sur son épaule et je le branlais en donnant des indications à Alain comme Monique l’avait fait plus tôt. J’ai mis longtemps à reconnaître qu’ils avaient raison et pour me faire pardonner, j’ai sucé Christian qui me griffait le crâne tant ses doigts se crispaient sous mes cheveux. Il entendait sa Monique gémir de plaisir, il la regardait jouir de son ami, j’étais à ses côtés, je le suçais, ça le rendait tellement heureux…! Quand Alain a dit « Ô, pute vierge, je viens, je viens ! », j’ai arrêté de sucer Christian et je lui ai dit « Montre-moi comme tu vas bien la baiser ta petite femme maintenant que mon homme a joui dans sa chatte et qu’il l’a bien fait jouir ».

Des clients se sont installés à la table d’à côté, nous avons décidé qu’il était temps de rentrer au village. Dans la voiture, Cathy a achevé son récit.

– Après tous ces efforts, nous sommes passés à table. Monique et Christian feuilletaient l’album à fantasmes. Elle était vraiment très excitée par les dessins de sodomie. « Ça m’excite beaucoup parce que je ne le ferai jamais. J’ai tellement peur d’avoir mal… » Nous parlions sans tabou, elle écoutait mes arguments de femme et nos hommes comprenaient les craintes des femmes à propos de cette pratique. Christian tournait les pages de l’album quand Alain lui a presque arraché des mains et l’a refermé comme il l’avait fait la veille, sauf que là, il n’avait plus l’excuse « Il est temps de dormir ». Je lui ai demandé s’il avait honte ou quoi. Il ne nous regardait plus et il avait l’air un peu triste, comme quand la fête s’interrompt brusquement alors qu’on s’amusait si bien. J’ai posé ma main sur la sienne pour lui dire qu’il pouvait garder ça pour lui. Il a regardé Christian « Vous allez me trouver ridicule » et il a ouvert l’album à la bonne page. Le papier était plus luxueux, le dessin plus appliqué et… pas du tout érotique. Il me représente assise à sa table, un bol de café devant moi et lui en train de me tendre une tartine de pain. En dessous, il avait écrit « Rêver un impossible rêve – Janvier 1974 ». Monique lui a demandé « Pourquoi “impossible” ? » Christian lui a demandé en quoi c’était ridicule. Et moi, je lui ai demandé pourquoi il avait fallu que Monique m’invite pour qu’on se revoie. « Je ne savais pas comment faire sans trahir Paulo… et puis… tu es tellement parfaite, je me sens si minable à côté de lui, de toi… Je n’aurais jamais osé… »

Alors c’est vrai que je l’ai un peu crié… « Si tu dis que tu es minable, maintenant que j’ai compris que je suis amoureuse de toi, tu dis que je suis amoureuse d’un minable et ça, je ne veux plus jamais l’entendre, tu m’entends ?! Plus jamais ! Et je vous prends à témoin, vous autres ! » Je venais de lui crier que j’étais amoureuse de lui, Alain était tellement surpris qu’il a ouvert la bouche en grand et ne la refermait pas. Monique lui a lancé une olive. Tu sais à quel point je l’aime, ma Monique, mais la prends jamais dans ton équipe à la pétanque parce qu’au lieu d’atterrir dans la bouche d’Alain, l’olive a failli me crever un œil ! Mais bon, au moins elle aura réussi à détendre l’atmosphère !

Avant de rentrer chez eux, Monique nous a demandé de prendre le temps de lire le cahier de sa Bonne-Maman pour qu’on puisse en parler ensemble, tous les quatre. Voilà, de ce jour-là, j’ai commencé à vivre avec Alain, mais je prenais toujours garde à faire semblant de dormir chez moi. Ça ne faisait pas un mois que je jouais cette comédie que la sœur à Paulo m’a surprise en m’attendant devant la porte de mon appartement. J’étais un peu gênée et comme je ne voulais pas qu’elle fasse un esclandre dans la cage d’escalier, je l’ai fait entrer chez moi. « Tu as rencontré quelqu’un, c’est ça ? Pourquoi tu t’en caches ? Je suis bien contente que tu cesses enfin de porter le deuil de Paulo, mais je suis bien triste que tu ne me fasses pas assez confiance pour me donner la bonne nouvelle ». Elle m’a prise dans ses bras et m’a souhaité tout le bonheur possible. Nous sommes restées très proches jusqu’à la fin, trente ans plus tard, mais elle n’a jamais su pour Paulo, la camionnette, les partouzes.

Quand nous sommes entrées dans la maison du Toine, Monique, Sylvie, Alain, Christian, Jimmy et Martial étaient en grande discussion à propos de la pandémie qui ne portait pas encore son nom, des mensonges d’État et de la répression qui s’abat chaque jour un peu plus violente sur les opposants à notre Napoléon III 2.0, comme l’appelle Monique. Je ne pus m’empêcher de sourire en l’imaginant faire enrager Aloune, la nuisette de Cathy à la main.

7 février 2020, les Pomponnettes font un beau cadeau à Blanche-Minette

*Georges Bizet, Henri Meilhac, Ludovic Halévy, L’amour est un oiseau rebelle in Carmen (1875)

La version de Carmen qui m’a fait découvrir la sensualité de cette œuvre, bien loin de l’interprétation lugubre de Maria Callas. Cette dernière remarque n’engageant que son autrice, c’est-à-dire ma pomme !