Odette&Jimmy – « Ces Highlands d’Écosse sont une sorte de monde sauvage, rempli de rochers, de cavernes, de bois, de lacs, de rivières, de montagnes si élevées que les ailes du diable lui-même seraient fatiguées s’il voulait voler jusqu’en haut. » *

Dérogeant à notre règle tacite, j’entretins une correspondance avec Jimmy, une partie de l’année 2012. Je ne voulais pas gâcher notre voyage en emportant mes ressentiments dans mes bagages, des aigreurs qui ne le concernaient pas. Tout avait commencé en 2011 avec la vente du pavillon. J’en avais reçu 70 %, Bertrand me reprochait notre contrat de mariage et en contestait la validité dans le cas présent. Le fond du problème, c’est que le prix de l’immobilier est bien plus bas en Seine-et-Marne qu’à Cannes. Je n’arrivais pas à lui pardonner d’avoir pris nos enfants à témoin.

Cette querelle était presque achevée quand j’en avais fait part à Jimmy, qui ne comprenait pas cette rage puisque la stratégie de Bertrand avait échoué, nos enfants s’étaient non seulement rangés à mes côtés, mais s’étaient aussi détournés de leur père. C’était justement ça que je lui reprochais ! Dans quelques années, les gamins s’en voudront de tout ce temps perdu en vaines querelles qui ne les concernaient pas et c’était sa faute, puisque c’était la base de son plan.

Et puis, il avait fallu que je me justifie quant à cette histoire de contrat de mariage. Beaucoup voient dans cette séparation de biens, une méfiance, d’au moins une des parties à l’encontre de l’autre, certains y lisent un mépris de classe dans le cas d’une « mésalliance », mais si je l’ai exigé c’est pour suivre le conseil et l’exemple de mes parents. En aucun cas la faillite de l’un ne doit être à l’origine de la déchéance de l’autre. Même s’il avait acquis la nationalité française dès la fin des années 40, mon père a longtemps vécu avec la crainte d’être expulsé en Côte d’Ivoire, spécialement dans les années qui ont précédé et suivi l’indépendance.

Je me souviens de ce jour où il m’avait indiqué cette cachette, au milieu d’un recueil de nouvelles de Maupassant Mademoiselle Fifi se trouvaient, soigneusement pliés à l’intérieur d’une enveloppe, nos certificats de nationalité française « Si jamais tu devais en justifier et que ni ta mère, ni moi ne soyons à la maison ». Mes parents n’étaient ni méfiants ni cyniques, ils étaient aimants et prudents. Après avoir correspondu à ce sujet, nos lettres se firent aussi rares que les années précédentes. En m’épanchant, j’avais pris le recul nécessaire et j’étais désormais certaine que mes ressentiments ne viendraient pas contrarier notre voyage annuel.

Après notre dîner-croisière et une nuit d’amour dans un grand hôtel parisien, nous nous envolâmes pour un séjour dans les terres du Nord du Royaume !

– J’ai pensé qu’un séjour pendant lequel nous cheminerions ensemble dans la lande, le vent humide fouettant nos visages ne pouvait que t’aider à chasser tes tracas.

Ces longues balades au cours desquelles nous restions souvent silencieux, à respirer à plein poumons le bonheur que nous ressentions, m’ont permis de m’opposer à Jimmy, pour la première fois, avec calme et fermeté.

Nous étions dans les derniers jours de janvier, peu avant de partir pour les îles Orcades. Dans cette petite bourgade des Highlands se tenait une kermesse locale ou une fête paroissiale avec les stands habituels. En nous promenant dans les allées de cette halle couverte, je tombais en émoi devant un petit pendentif. Je tirai Jimmy par la manche « Regarde ! J’ai trouvé ma breloque ! » Il éclata de rire, j’en fus vexée, mais me tus.

Un peu plus tard, il me désigna la vitrine d’un bijoutier « On va te trouver un bijou plus digne de toi, ma Princesse ! ». Mes yeux s’emplirent de larmes de rage.

– Pourquoi refuses-tu de m’écouter ? Pour faire ce pendentif, cette gamine a mis tout son cœur, en tout cas, je veux y croire. Je me sens toute aussi importante dans la suite nuptiale d’un palace qu’en marchant à tes côtés dans la lande. Je ne veux pas oublier ce sentiment qui s’emparait de moi quand tu me tenais par la main, puis quand tu m’attirais vers toi pour me prendre par la taille… et nos pauses dans la bruyère… J’ignore encore quels beaux souvenirs vont nous réserver les jours à venir, mais ce petit pendentif…

Les larmes avaient disparu de mes yeux, elles emplissaient le regard de Jimmy.

– Je me sens minable, tu as raison, ma chérie…

La gamine parut surprise de nous voir revenir vers son stand. Elle le fut davantage quand Jimmy lui demanda s’il était possible de transformer le pendentif en breloque pour mon bracelet. Je ne pigeais pas un mot de la gamine à l’accent infernal, Jimmy me traduisait les réponses à ses questions. Quand il lui demanda si ce bijou avait une histoire, elle s’anima et expliqua

– Chacun de mes bijoux a une histoire, correspond à un moment précis, un souvenir que je matérialise ainsi !

Nous étions les premiers à lui avoir posé la question, les autres badauds qui lui avaient parlé avaient demandé « C’est toi qui fais ça ? »et« Le trucc’est combien ? ». Elle se souvenait précisément du souvenir qu’elle avait voulu mettre dans ce bijou, de l’endroit où elle avait cueilli les fleurs, de ses esquisses, elle se souvenait de ses sentiments tandis qu’elle le réalisait, ce qu’elle avait ressenti en le voyant achevé. Quand nous lui avons demandé quel était donc ce souvenir, elle éclata d’un rire soudain très mature.

– Ça, c’est de l’ordre de l’intime. J’ai fait ma part en le confectionnant, à vous d’en inventer la signification !

Jimmy lui demanda la permission de la prendre dans ses bras et de l’embrasser.

– Si j’avais eu une fille, j’aurais aimé qu’elle fût toi !

– Dis donc, monsieur le coquet, vu ton âge et le sien, tu devrais plutôt évoquer ta petite-fille !

Jimmy estima que cette impertinence justifiait une sanction, qui s’avéra être des plus agréables.

Nous avions débarqué à Birsay quand Jimmy me proposa une balade nocturne en costume local. Je connais son goût pour les déguisements depuis toujours. Je le savais déjà alors qu’il était encore coopérant. Lui et Martial enseignaient au lycée français local, tandis que Jean-Luc avait été affecté dans la classe unique d’un village plus reculé. Le roman national de l’époque racontait une France résistante avec, pour son malheur, un vieillard sénile à sa tête. Il fallait bien évoquer la collaboration, mais sans s’y appesantir. Certains des élèves de Jimmy voulaient scinder les Français en deux groupes distincts, les résistants d’un côté, les collabos de l’autre. Quid de ceux qui n’entraient ni en résistance, ni en collaboration ?Après s’être concertés, les élèves avaient décidé de les placer dans la catégorie des collabos. « Ne pas résister, c’était collaborer ! ».

Au cours suivant, ils trouvèrent une boîte sur chaque pupitre.

– En consultant les journaux officiels de l’époque, je vous ai acheté vos rations alimentaires si vous habitiez en zone occupée en janvier 1943. Vous êtes vernis parce que vous êtes dans la catégorie J2, l’une des mieux loties en matière d’alimentation. Vous êtes sacrément vernis parce que j’ai pu trouver tout ce à quoi vous donnaient droit vos tickets et vos cartes de rationnement, c’était rarement le cas. Vous l’êtes d’autant plus que la viande n’est pas trop mal coupée, les fruits ne sont pas véreux, les légumes non plus, le lait n’a pas été délayé. Pour obtenir tout ceci, il fallait compter dix bonnes heures de queue, dans le froid. Combien d’entre vous connaissent la rigueur de l’hiver en métropole ? Ne comptez pas vous chauffer au charbon, 50 kg pour l’hiver, on ne va pas bien loin.

Il regardait ses élèves découvrir le contenu de leur boîte, ouvrant des yeux étonnés, réalisant que rien n’était aussi simple qu’ils le croyaient. Et ils avaient si peu à manger par jour. Jimmy avait réussi son coup, il porta l’estocade « Détrompez-vous, c’était les rations pour une semaine ! Vous comprenez qu’avant de chercher à s’enrôler dans un camp ou dans un autre, la première préoccupation des citadins était comment trouver à manger, de quoi se chauffer ? »

Quand il avait repris le sujet de thèse de Jean-Luc, qu’il avait écouté les témoignages, qu’il en avait recueilli d’autres, il avait ressenti le besoin d’éprouver physiquement le froid. Il avait dormi dans la boue, dans le froid avec la tenue des poilus. Il avait gravi une petite colline, au pas de charge le fusil à la main. Il avait dû s’y reprendre à plusieurs reprises et encore, aucun cadavre, aucun blessé, aucune explosion pour le faire trébucher, aucun ennemi pour le canarder.

Mais si je connaissais cette manie toute scolaire, j’en ignorais la version « arts du spectacle ».

Jimmy m’avait trouvé une jupe à Édimbourg, en feutre de laine, très lourde, plusieurs jupons, une culotte longue qui ne se fermait pas « pour pouvoir pisser sans avoir à découvrir tes jambes, tes fesses » m’avait, toujours soucieux du détail, précisé Jimmy. Il avait aussi acheté une chemise en coton et une autre plus épaisse, des bas de laine, une coiffe qui avait bien du mal à rester en place. Mon costume reposait sur le lit, j’étais en train de me dévêtir quand un détail me fit battre le cœur. Je me retournai pour dire à Jimmy que ça faisait bien longtemps que je n’avais pris un tel plaisir à voir mon reflet dans le miroir.

– CLIC-CLAC !

– Avec un appareil entre les mains, ça marcherait mieux !

– De toute façon, j’en aurais eu un entre les mains, la photo, je me la serais gardée rien qu’à moi ! L’éclat de ton visage, Princesse ! L’éclat de ton visage ! Que voulais-tu me dire ?

– Que je me suis vue… que je me vois comme tu me vois !

Nous marchions dans l’obscurité à l’écart de la ville, nous hésitions à sortir le flash de crainte de nous faire repérer. Nous nous dirigeâmes vers la nuit noire, heureux, riant de bonheur. Nous envoyant des poèmes au visage comme d’autres s’envoient des baisers. J’étais épatée de la diversité et la richesse de ses choix autant qu’il l’était des miens.

J’avais même fini par le trouver séduisant dans sa tenue locale, de prime abord si ridicule. Jimmy avait apporté un trépied puisque je devais garder la pause assez longtemps. Souvent, il me rejoignait et déclenchait l’appareil-photo à distance.

J’aimais quand il nous mettait en scène. Lui, un genou à terre devant moi, une main posée sur son cœur, l’autre se tendant vers moi dans un geste de supplique désespérée. Il me déclamait sur un ton très Comédie-Française « À faire flamber des enfers dans tes yeux, à faire jurer tous les tonnerres de Dieu, à faire dresser tes seins et tous les Saints, à faire prier et supplier nos mains, je vais t’aimer… » puis, s’enflammant « Je vais t’aimer comme on ne t’a jamais aimée, je vais t’aimer plus loin que tes rêves ont imaginé.Je vais t’aimer comme personne n’a osé t’aimer ». Il allait donc de soi que je détournais le regard dans un mouvement de recul horrifié. Alors, vaincu, la voix mourante, il murmurait « Je vais t’aimer ».

Le manque de lumière nous contraignit à faire très peu de clichés de ce début de balade. Jimmy, inspiré, me proposa soudain de me tenir sur ce rocher, à contre jour et d’écarter mes bras de telle façon que mon châle me fasse des ailes « Et s’il y a du vent, le flou te dessinera une aura ». Il installa l’appareil-photo et pour me mettre dans l’ambiance, déclama une poésie de Walter Scott. Le temps de pause allait être très long, je répétais le mouvement avec lui. Le froid était piquant malgré mes chemises boutonnées. Quand nous fûmes au point, Jimmy reprit sa récitation puis se tut brusquement, bouche bée, les yeux écarquillés. Des vaguelettes de lumière verte, de plus en plus variées nous enveloppaient peu à peu.

Le hasard a voulu qu’il aperçoive les premières lueurs de cette aurore boréale quand j’écartais et levais les bras. Il faisait semblant de vouloir me faire croire à un « signe significatif », à un « miracle miraculeux », tout au moins à un « mystère mystérieux », tandis que je faisais semblant d’être agacée par ces foutaises, par ses airs énigmatiques et tentais de le « raisonner raisonnablement » de faire montre de « pragmatisme pragmatique ».

Un éclair de lucidité me parvint enfin « Eurêka ! » Je m’approchai de Jimmy à pas feutrés, écartai les pans de son large duffle-coat, bénis intérieurement la sagesse des anciens et la coupe de leurs pantalons qui permettaient de sortir l’outil dans avoir à se dégueniller.

– Voyons voir à quoi ressemble ta bite sous cette lumière…

– Ma verge, Princesse, ma verge !

– Voyons voir…

– Tu perds pas le Nord, toi !

– C’est le cas de le dire !

Comme je veux bien l’admettre, c’est parfois le cas, je m’amusai à orienter le sexe de Jimmy sous différents angles pour admirer toutes les subtilités de ses reliefs sous cette lumière féerique. Je l’en oubliai quelque peu, certes, mais pour autant, mon désir ne faisait que croître.

– À quoi tu penses, Princesse ?

– Tu crois qu’on y verrait quelque chose, sur une photo, si tu me prenais en levrette, là, maintenant ? Avant que la lumière ait disparu, mais en gardant nos costumes ?

– Si c’est pour une espérience ès scientifique… haut les cœurs ! Sacrifions-nous gaiement !

Je posai mes mains sur ce rocher dont la hauteur était idéale pour l’exercice. Les mitaines protégeaient mes mains tout en permettant à mes doigts de s’agripper à la végétation. Je me penchai suivant les indications de Jimmy qui souleva ma cape, ma jupe, mes jupons. J’avais l’impression qu’il avait posé un sac à dos sur mes épaules. Un coup de vent rabattit ma cape et ma jupe au-dessus de moi, me rendant aveugle pour un temps, je ne pouvais compter que sur mes autres sens, aiguisés par le froid.

– Même de là où je suis, je n’y vois goutte, Princesse ! Pour y voir quelque chose, il faudrait que je découvre tes fesses, que je les libère en écartant les pans de ta culotte, mais je ne veux pas que le froid te gâche le plaisir…

– Essaie, je te dirai…

Jimmy se plaignit du froid qui recroquevillait son sexe, malgré son érection. « Ah ! Tu vois, j’avais raison quand je parlais de bite ! » Je ne pus m’empêcher de rire quand en me pénétrant, il poussa un soupir de soulagement, et frissonna de bien-être.

– Mon radiateur portatif… !

– Tu sais parler aux femmes, toi !

J’aurais aimé qu’il se montrât un peu plus brutal, je ne comprenais pas pourquoi il bougeait si doucement en moi. Il me donna la réponse avant que je lui pose la question.

– Tu es tellement mouillée, Princesse… avec la lumière… on dirait que mon membre… de l’opale… on dirait de l’opale… j’essaie de prendre des photos… c’est… fascinant…

– Si tu restes trop longtemps la queue trempée à l’air, tu vas choper un rhume de bite, mon amour…

Ayant retrouvé ses esprits, il éclata de rire et me prit enfin avec toute la sauvagerie dont nous avions envie. J’aimais sentir la paume de mes mains se fendiller malgré les mitaines, j’aimais sentir ces petites épines déchirer la peau de mes doigts, mes seins et mes genoux heurter le rocher à chaque coup de boutoir de Jimmy.

– Ça va, ma… hmm… chérie ? Pas trop froid aux… han ! han…fesses ?

– Une claque, peut-être ?

Je crus que ma peau avait éclaté sous sa main tant mes fesses étaient froides, mais aussitôt une douce chaleur se répandit comme une onde bienfaisante.

– Encore ! Plus fort !

– Quoi plus fort ? Ça (claque) ? Ou… han… ça ?

– Les deux ! Plus fort ! Encore ! Oui ! Encore ! Plus fort ! Oui !

Mes paumes étaient moites, je m’en étonnai quand je remarquai cette même sensation de moiteur sur mes genoux. Les frottements répétés, les à-coups de plus en plus vifs, qui me projetaient plus rudement contre la pierre avaient provoqué des plaies qui étaient en train de saigner. Sans m’en rendre compte, j’avais redressé mon buste pour préserver mes seins des conséquences de cet assaut.

J’aimais imaginer que mes cris s’évanouissaient au loin en s’unissant avec ces ondes lumineuses. J’aimais le ton autoritaire de Jimmy quand il me demandait si j’aimais ça, quand il me faisait ça. Quand il m’enjoignait de crier ma réponse. J’aimais à bout de souffle, épuisée, regrouper ce qui me restait de force pour le supplier « Encore ! ». J’aimais ces claques revigorantes qui m’insufflaient l’énergie nécessaire pour aller un peu plus loin sur le chemin de ce plaisir incroyable qui grondait, vrombissait en moi comme un volcan au bord de l’éruption.

Jimmy s’extasiait de ce que nous vivions. Son corps savait d’instinct comment libérer ce qui couvait en nous, bien plus qu’un orgasme, et mon corps en avait également conscience. Nous étions deux musiciens qui interprétions la même partition, qu’ils découvraient ensemble, dans une harmonie et une confiance des plus totales.

Mon sexe coulait de tous mes sucs, j’aimais l’alternance du chaud et du froid au rythme de ses va-et-vient. Je tournai à grand peine mon visage vers le sien, il put lire mon souhait dans mes yeux. Il posa sa main sur mon ventre, l’autre prenant mon épaule, m’aida à me redresser suffisamment pour pouvoir mordre ma nuque sans cesser ses mouvements. J’ai joui d’entendre son cri quand il jouit à son tour, ses crocs plantés dans mes chairs, un cri si animal qu’il en avait les accents de l’enfance.

Nos corps écroulés, rompus de bonheur, nous plaisantions en cherchant à estimer le temps nécessaire avant d’avoir la force de réintégrer notre intérieur cosy. Nous y parvînmes plus vite que nous l’aurions cru et tandis qu’il me débarrassait de ma lourde cape, Jimmy sourit, me montra l’intérieur de sa paume, quelques brins de bruyère s’étaient accrochés à l’épais tissu. Il souleva ma main à hauteur de ses yeux, s’adressa à la breloque « Dire que je t’ai moquée, alors que ma Princesse avait tout de suite compris que tu étais un puissant talisman d’amour ! »

Il m’embrassa. « Tentons de dormir un peu, j’aimerais consacrer la journée de demain au travail, si tu n’y vois rien à redire… » Je souris à cette perspective et mutine, lui demandai s’il préférait que je le laisse travailler seul ou s’il m’autoriserait à rester allongée sur le canapé, à somnoler.

Tout avait commencé à Édimbourg, quand il avait défilé devant moi dans sa « tenue holmésienne ». J’avais ri en lui rétorquant qu’il ressemblait davantage à un expert comptable en week-end à la campagne qu’à Sherlock Holmes. Il avait alors dégainé une pipe, mais elle me renvoyait l’image d’un critique littéraire venu s’isoler dans le manoir familial avant la sortie de son prochain ouvrage. De fil en aiguille, un scénario avait pris forme et nous nous amusions à nous filmer en train de le jouer. À notre retour, Jimmy en ferait un montage qu’il copierait sur une clé USB avant de l’envoyer à Jim.

Jimmy avait été ému de ma réaction quand il m’avait fait lire les lettres de Jim « Quand je vois Odette sur les photos, que je bande, je regarde ma queue en souriant et je suis fier de savoir qu’elle lui a donné du plaisir ! J’ai touché, j’ai baisé la pin-up que je vois sur les photos ! C’est incroyable comme sensation ! Merci ! » Cet homme d’à peine cinquante ans me voyait comme une pin-up !

– Ça veut dire que dorénavant, fini le n’importe quoi, faudra faire attention au cadrage, à la lumière, à faire de belles photos… Je n’ai plus le droit de le décevoir, non ?

*Sir Walter Scott, Rob boy (1817)