La petite fée captive d’une capucine

À la lisière d’une forêt, détonant au milieu d’un tapis de violettes, une capucine orange surprise par l’aurore n’a pas encore déployé ses pétales. Elle retient prisonnière la petite fée imprudente qu’elle a capturée quand tombait la nuit.

La petite fée imprudente, affolée d’être la captive de ses pétales soyeux a tout d’abord tenté de s’échapper. Elle tournoyait dans la corolle, se heurtant à la soie devenue rempart. Quand elle pensait accéder enfin à la liberté, inéluctablement, elle retombait au fond de la clochette.

Elle aurait voulu pleurer, mais ses larmes restaient coincées, tout comme elle l’était.

Assise dans cette geôle, elle se calme peu à peu. Quelle est donc cette odeur qui la ravit tant ? Cette odeur délicate et entêtante ? La petite fée la suit, étonnée, curieuse et surprise par ce parfum qui lui est encore inconnu…

Arrivée à l’extrémité d’une étamine, elle ouvre sa bouche et commence à la goûter… au début, d’un bout de langue timide… sa timidité a tôt fait de se muer en gourmandise. La petite fée imprudente se fait impudique, elle lèche, avale, dévore, déguste la première étamine avec autant de plaisir que si c’était une verge offerte à ses baisers.

Repue des sucs de cette première anthère, étourdie par cette douce ivresse, la petite fée s’amuse à glisser le long du pétale comme elle le ferait le long d’un toboggan, si sa petite taille ne lui interdisait pas cette joie enfantine. C’est alors qu’elle remarque l’extrême douceur du duvet qui tapisse l’intérieur de la corolle. Son plaisir rieur et enfantin se transforme en plaisir charnel, en plaisir sensuel. La peau de son dos frémit agréablement à chaque glissade, qu’elle effectue à un rythme de plus en plus rapide.

Exténuée, en sueur, la peau rougie, elle se repose, lovée au fond de la fleur. Les yeux ouverts, elle remarque cette autre étamine qui semble l’appeler, l’inviter par son chant muet. La petite fée entreprend l’ascension, guidée par ses sens aiguisés, en alerte…. arrivée au sommet, un grain de pollen s’échappe, lui inspirant un désir fou…

Elle s’empale sur l’étamine tentatrice et lui fait l’amour avec toute la science de sa candeur… elle aime se sentir pleine, se sentir vide… pleine encore… Elle se penche en avant, elle se penche en arrière, elle se penche sur les côtés, jouissant de ces différentes vibrations qu’elle s’offre à chaque changement de position.

Elle crie de son minuscule cri de fée, presque inaudible… enfin, son plaisir explose tel une fontaine… Elle inonde sa geôle et s’endort… enfin apaisée grâce à ce plaisir fou qu’elle vient de prendre tout en étant captive.

Quand au petit matin le soleil réveille la nature, quand la chaleur de ses rayons donne envie aux pétales de s’étirer, aux corolles de se déployer, la capucine s’ouvre, délivrant sa prisonnière qui s’envole vers de nouvelles aventures…

Un peu changée, la petite fée se demande si elle devra, désormais, se montrer plus prudente… Un dernier regard… en découvrant les traces de sa jouissance, elle décide que non. Définitivement non. À tout jamais, elle acceptera de tomber dans tous les pièges que la vie lui tendra pour n’en garder que le souvenir du plaisir qu’elle y aura pris.

Je dois la photo et l’idée de ce texte, à la douce Ingrid, ma si belle et talentueuse amie.

Fin de la balade ! Pour en refaire une autre, cliquez ici !